Document 3 mai 1995 - C'est l'aube, dans un coin de la banlieue lyonnaise, aux abords d'un canal noyé de brume. Une voiture s'arrête. A bord, trois hommes recrus de fatigue et de tension nerveuse. Soudain, une nuée de gyrophares balaye la scène. Des coups de feu éclatent. Ce pourrait être un bon début de roman policier mais ce n'est qu'une banale réalité urbaine. Parmi ces trois hommes arrêtés, figure Louis Perego. Après une année et demie de liberté provisoire et malgré une réinsertion réussie, la Cour d'assises de Bourg-en-Bresse le condamne en 1992 à douze ans de prison. Le coup de grâce... Commence alors une longue attente qui s'achève par une libération conditionnelle à Noël 1994. S'il est des livres qu'on ne lit que d'une main, Le coup de grâce quant à lui, n'est pas apprécié de même manière par l'oeil droit et par l'oeil gauche. Pour l'oeil droit, qui se veut exclusivement liseur, quelle bonne chose que ce nouveau livre après Retour à la case prison ! Louis Perego y confirme ses qualités d'écrivain. Il nous passionne et nous émeut. Grâce à lui, à son intuition sensible, nous pénétrons une seconde fois par procuration dans cet univers carcéral si opaque à ceux du dehors. On serait presque tenté de remercier le président de la Cour d'assises de Bourg-en¬Bresse qui, en faisant condamner l'auteur à une peine absurde, nous a procuré ce grand plaisir de lecture. L'oeil gauche ne peut s'empêcher d'être un peu citoyen. Et il s'afflige de découvrir l'inventaire d'un effroyable gâchis judiciaire. Pourquoi Perego, qui admet parfaitement avoir encouru une sanction, a-t-il été condamné avec une rigueur exclusive de toute appréciation de sa personnalité ? Pourquoi, après une raisonnable mise en liberté provisoire, le coup de matraque d'un verdict qui se voulait coup de grâce ? Si un homme méritait que la société lui accordât enfin une chance, après les lui avoir systématiquement refusées pendant si longtemps, n'est-ce pas Louis Perego ?