Marcel Peyrouton est né à Paris le 27 juillet 1887 dans une famille de juristes d'origine basque. Son père ayant obtenu le poste de trésorier général de la Martinique, c'est au lycée Saint-Pierre qu'il fera ses études secondaires. De retour en métropole, il passe son baccalauréat et s'inscrit à la Faculté de droit, mais engagé volontaire pour trois ans, il terminera ses études à la sortie de l'armée et obtiendra le diplôme de docteur en droit.
Reçu au concours du ministère des colonies en 1910, il est nommé chef de cabinet du gouverneur de Tahiti.
Rappelé à la mobilisation générale de 1914, il est grièvement blessé, mais il reprend du service dans l'aviation après une convalescence de six mois et combat aux Dardanelles. Au lendemain de la guerre, il remplit une mission en Suisse, puis est affecté à Madagascar, et plus tard au Cameroun et au Togo. Il est nommé, en avril 1930, secrétaire général du gouvernement de l'Algérie. Aux côtés du gouverneur général Carde, il s'initiera aux tâches qui lui incomberont plus tard et développera les qualités de méthode, d'ordre et de fermeté qui le feront choisir pour le poste de résident général en Tunisie.
En 1933, la Tunisie, atteinte de plein fouet par la crise mondiale de 1929 et souffrant d'une sécheresse prolongée, est dans une situation dramatique génératrice de troubles de tous ordres ... Avec rapidité et décision, le nouveau résident général prend les mesures qui s'imposent: institution d'un moratoire, création de commissions arbitrales, rachat par l'Etat tunisien de créances agricoles, attribution de lots aux agriculteurs de profession. Une réforme administrative en profondeur est amorcée. En trois ans de travail acharné, Peyrouton réussit à sauver l'essentiel et, au vu de ces résultats, en avril 1936, Albert Sarraut l'envoie au Maroc pour accomplir un travail similaire, la situation dans les deux pays étant comparable.
Aidé de son équipe personnelle venue de Tunis et des fonctionnaires de la Résidence, en accord avec S.M. Sidi Mohammed, Peyrouton concentre et accélère la marche de toutes les affaires administratives, crée un comité permanent de défense économique, trace un programme de travaux publics, fixe des normes de travail dans les entreprises, unifie les transports, affecte des crédits à la lutte contre le taudis, enraye la crise de la viticulture, développe l'instruction publique. Ces mesures impressionnent fort les Marocains qui s'en vont répétant : « Si le corps du maréchal Lyautey est dans son mausolée, Allah a transporté son âme dans celui de M. Peyrouton. »
L'arrivée au pouvoir du Front populaire, puis la deuxième Guerre mondiale modifient la carrière de Peyrouton. Il est rappelé à Paris en septembre 1936. Elevé à la dignité d'ambassadeur, il représente la France en Argentine jusqu'en 1940. Compromis malgré lui dans le gouvernement de Vichy, il est renvoyé en février 1941 dans son ambassade d'Argentine où il restera jusqu'en avril 1942.
Il rejoint ensuite l'Afrique du Nord. Le général Giraud le nomme gouverneur général de l'Algérie. Mais, au cœur de l'affrontement Giraud-De Gaulle, il préfère s'effacer et reprendre du service dans l'infanterie coloniale. Trois mois plus tard, il sera arrêté et restera cinquante-cinq mois en prison préventive au régime de droit commun avant d'être acquitté par la Haute Cour le 22 décembre 1948. Revenu l'année suivante dans son cher Maroc, il y passera de longues années occupé à différentes tâches, principalement journalistiques et littéraires. Il rédigera ses mémoires, puis une série d'articles parus au début des années 50 dans un quotidien marocain, et enfin un ouvrage historique sur le Maghreb.
Il meurt à Saint-Cloud où il s'était retiré, toujours fidèle aux idéaux de sa jeunesse. D'une force de caractère peu commune, avec un sens inné du devoir et un indiscutable désintéressement, Marcel Peyrouton a parfaitement incarné le type de ces hauts fonctionnaires, de ces grands commis dont la République avait su s'entourer aux temps de la période coloniale.
d'après Martine Schneegans-Peyrouton