Nouveau portrait du jour sur la page FB "Culture et justice" - En attendant de publier ce portrait dans la nouvelle version "Culture et Justice" de l'association Criminocorpus, nous mettons en ligne celui de Dominique Bourgeon
Docteur en sociologie et ancien Directeur des soins,
Lors de ses études de troisième cycle à l'université de Nanterre, il a étudié les régimes totalitaires du XXe siècle et leur origine sociétales et symboliques.
Au quotidien, l'écrivain partage son temps entre la restauration de tableaux et le jardinage. Plus que les grandes figures de l'impressionnisme et du cubisme, il se consacre à l'étude des petits-maîtres régionaux du début du XXe siècle, car le talent s'avère multiple et souvent caché.
La Malédiction de Kammerer (2015) est son premier roman...
"Comment suis-je devenu écrivain ? Comment mon désir d’écrire s’est-il transformé en une véritable passion ? En quelques lignes, tentons d’esquisser certaines réponses…
A l’approche de la quarantaine, j’ai souhaité reprendre des études universitaires. Je travaillais depuis de nombreuses années dans le milieu hospitalier mais, à cette époque, il ne m’offrait plus de possibilités d’évolution. Au fil des rencontres et des lectures, je me suis orienté vers un cursus de sociologie. Et la lente construction de ma thèse de doctorat s’est nourrie d’un rapport singulier aux mots. Je me suis attaché à l’étymologie, à l’évolution des termes à travers le temps et à leur polysémie. Souvent, ils me révélaient des dimensions symboliques insoupçonnées. A titre d’exemple, j’ai découvert que le vocable « cadeau » renvoyait, au XVIII° siècle, à des fêtes galantes, que l’expression « un cadeau empoisonné » évoquait l’adultère, la mise à mal de l’ordre établi par le pouvoir de la séduction. Ainsi, on ôte le papier cadeau comme nous déshabillons l’être que nous chérissons.
J’ai cultivé cette approche avec infiniment de plaisir et elle a construit mon rapport à l’écriture. Je me suis d’abord consacré à l’étude de l’hôpital. J’ai tenté d’éclaircir quelques petits mystères de mon quotidien professionnel. Cette démarche a conduit à la rédaction de plusieurs ouvrages et articles de sociologie au cours d’une quinzaine d’années.
Puis… Je me suis lassé. J’ai souhaité m’affranchir des contraintes de l’écriture scientifique. Ne plus référencer mes propos, ne plus devoir étudier une succession d’auteurs pour affirmer ma pensée. Je voulais donner libre cours à mon imagination, animer des personnages, libérer le champ des possibles.
Mais dans quelle direction ? Pourquoi emprunter celle des romans policiers ?
Pour plusieurs raisons. D’abord, le crime constitue la transgression suprême. Il menace les bases de l’ordre social, révélant, amplifiant toutes les facettes de la nature humaine. Le meurtre agit comme une loupe éclairant les tréfonds de l’âme. En cela, il me questionne et rejoint l’une de mes préoccupations majeures. Depuis plusieurs décennies, je m’intéresse justement aux ténèbres, aux abysses de notre esprit. J’ai longuement tenté d’appréhender les mécanismes du mal à travers l’étude du nazisme. Comment des êtres humains, tuant des enfants dans des chambres à gaz, pouvaient regagner la douceur de leur foyer, la journée achevée ? J’ai relevé, bien entendu, quelques pistes mais l’essentiel m’a échappé. La noirceur de l’esprit humain demeure, pour moi, un mystère. Un mystère suscitant toujours mon intérêt. Autrement dit, cette noirceur reste intrigante et, par conséquent, elle nourrit mes intrigues.
L’intrigue suggère des possibles, entrelace des situations, fonde une énigme qui, comme le cadeau, doit être dévoilée. Ce processus constitue un formidable vecteur de l’imagination, de la curiosité. Qu’elle soit petite ou grande, qu’elle traverse l’histoire ou qu’elle émerge d’un banal fait divers, l’énigme me fascine comme elle fascine nombre de lecteurs.
Étant donné mon parcours, j’ai lu beaucoup d’essais et d’ouvrages de sciences humaines. Toutefois, fils unique, j’ai connu des moments de solitude. Très tôt, les aventures d’Arsène Lupin m’ont fait rêver. Avec elles, j’ai franchi les murs de ma chambre. Beaucoup plus tard, j' ai frissonné avec les romans de Stephen King, notamment avec «Ça », une immense fresque où je me suis identifié à quelques personnages. Enfin, plus récemment, je me suis laissé porter par les livres d’Arnaldur Indriðason. Pour deux raisons. Ses intrigues dépeignent en filigrane la société islandaise et ses démons. Mais au-delà, le drame personnel de son personnage principal irrigue plusieurs romans. L’homme a perdu son frère lors d’une tempête hivernale. Il a disparu sans laisser de traces. Et la disparition constitue une énigme sans fin, une hantise qui ajoute une dimension singulière à ces récits.
Quant à moi, mon second polar « Coups de folie » vient d’être publié aux éditions Lajouanie. J’ai souhaité mettre en scène une femme perdue. J’ai situé l’intrigue au sein d’immensités désertiques pour mieux souligner sa solitude et sa souffrance. Au fil d’une énigme policière, elle va rejoindre les confins de la démence où le mal apparaît dans ses dimensions historique et symbolique. Mais au-delà de ce personnage , le roman dépeint un environnement où le passé, la maladie mentale et physique se conjuguent au fil des chapitres. En cela, il rejoint la cible des éditions Lajouanie : « des romans policiers mais pas que… »
Je viens, par ailleurs, de terminer un manuscrit traitant justement des disparitions. Elles ne concernent que des femmes ayant été le témoin d’étranges phénomènes. Pour démêler le fil de l’histoire, les enquêteurs vont devoir flirter avec le paranormal sans toutefois abandonner leur rationalité. Le récit offre le fantastique aux lecteurs comme une perspective propre à chacun mais ne s’impose pas dans ce type de littérature. L’irrationnel n’est qu’un prétexte pour une histoire où la féminité reste centrale.
Au fil des années, l’écriture est devenue une passion qui mobilise mes pensées et mes matinées. Le reste du temps, je me consacre à des activités plus prosaïques."
Juillet 2015, alors que la menace terroriste est à son plus haut niveau, l’adjudant de gendarmerie Éléonore Darras rejoint sa nouvelle affectation, au fin fond de la Lozère, où elle a été mutée pour avoir dénoncé le harcèlement sexuel permanent dont elle était victime de la part de son supérieur.
À peine arrivée, elle va devoir résoudre une série de crimes abominables, dont les victimes semblent liées à la mouvance anarchiste. Parallèlement à cette enquête le sous-officier doit faire face à l’hostilité apparente de sa chef, le lieutenant Sonia Hurni, officier énigmatique à la personnalité pour le moins déroutante.
Dominique Bourgeon est sociologue. Il a publié de nombreux ouvrages professionnels. Coups de folie est son deuxième roman.
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A propos du site : Criminocorpus propose le premier musée nativement numérique dédié à l’histoire de la justice, des crimes et des peines. Ce musée produit ou accueille des expositions thématiques et des visites de lieux de justice. Ses collections rassemblent une sélection de documents et d’objets constituant des sources particulièrement rares ou peu accessibles pour l’histoire de la justice.
Relecture et mise en page Ph. P et S.P.
Politique éditoriale de la page "Culture et Justice" - Le blog de Philippe Poisson
Le carnet de recherche de Criminocorpus a été créé en 2008 sur la plateforme Hypotheses avec l'objectif de couvrir l'actualité de la recherche en histoire de la justice. Il s'est progressiveme...