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NOUVEAU portrait du jour : Catherine Heurteux Peyréga.

Culture et justice développe la rubrique Portrait du jour, ouvre ses pages aux fidèles lecteurs de la page et reçoit avec infiniment de plaisir Catherine Heurteux Peyréga.

Juste après ses études à Bordeaux, Catherine Heurteux Peyréga enseigne à l’université du Burkina Faso. Puis elle rejoint le sud de la France, où elle aura plusieurs expériences dans la finance et la stratégie d’entreprises. Retrouvant en 2008 ses racines gersoises, elle travaille pour des cabinets de conseil aux comités d’entreprise, aux côtés des salariés défendant leurs emplois. Sa fibre littéraire et son intérêt pour la sociologie refont alors surface. Elle fonde la maison d’édition Le vent se lève ! consacrée aux résistances d’hier et d’aujourd’hui. Avec La trappe, son premier roman, elle s’ouvre à une nouvelle expérience, celle d’auteur.

Bienvenue Catherine sur le très discret et prisé Culture justice.

 

 

Catherine, comment en es-tu arrivée à écrire ce premier roman, la Trappe ?

C’est un long parcours, l’écriture ne m’est pas venue facilement ni de façon précoce, comme si j’avais dû l’apprivoiser petit à petit ! Je dois être une littéraire contrariée, car j’ai adoré ma filière littéraire au lycée - latin grec, comme on disait à l’époque : « plus littéraire, tu meurs ! » - et j’aurais pu poursuivre ce chemin-là. Mais j’étais vraiment jeune en arrivant à la fac de Bordeaux et c’est mon papa qui m’a orientée vers Sciences Po et la sociologie… que j’ai autant aimées que la littérature ! J’ai même fait un doctorat sur la sociologie des coups d’Etat militaires en Afrique, c’est dire si j’ai plongé ! Et ensuite j’ai été happée, je ne sais pas vraiment pourquoi, par des études en commerce et finance qui m’ont entrainée à HEC-ISA et même à l’Institut technique de banques. Sans doute, je le concède, parce qu’avec la littérature et la sociologie, c’est difficile de faire bouillir la marmite d’une famille !

Tu as donc une grande famille ?

Finalement, oui ! J’ai eu quatre enfants qui sont ma plus grande fierté, les quatre pieds de ma vie ! Une famille moitié africaine, moitié normande, grâce aux gènes et à l’héritage de deux papas, une belle famille avec maintenant 3 petits-enfants … et même déjà une arrière-petite-fille.

Alors la Trappe, comment s’est-elle ouverte pour toi ?

En fait j’ai toujours été tentée par les livres, comme un fruit défendu dans lequel je voulais mordre ! Défendu par ce que je n’avais pas le temps, ni de beaucoup lire et encore moins d’écrire, défendu parce que très éloigné de mon métier. Quand j’ai écrit la première ligne de la Trappe (c’était à côté de Luchon, dans le col du Portillon) j’étais consultante dans un cabinet d’expertise auprès des Comités d’entreprise ; j’avais un métier passionnant et dévorant car la défense des salariés, notamment lors des plans de licenciements et les fermetures d’usine, était mon quotidien, aux côtés des syndicats. Et puis un jour, l’idée, la trame du roman est venue de mon mari, Dominique, qui a imaginé cette histoire d’un sombre avocat qui revit les jours abominables qu’il a vécus à Auschwitz-Birkenau, à l’occasion d’un procès où il défend des Juifs contre des nazis qu’ils ont retrouvés et traînés en justice. Je n’en dis pas plus pour ne pas déflorer l’intrigue - on dit spoiler aujourd’hui !

C’est un roman écrit à quatre mains alors ?

En fait je me suis inspirée de l’idée de Dominique. Il m’a apporté le scénario sur un plateau ! Et j’ai pris un plaisir incroyable, inattendu d’ailleurs, à créer les personnages, Ilan, Hannah, Sarah et Eva, à décrire les lieux du drame, de Toulouse à la grange perdue au-dessus du lac de Payolle. Et puis à reconstituer l’époque aussi, celle des années 70, en faisant attention à ne pas faire d’anachronismes !

La Trappe replonge le lecteur dans l’univers concentrationnaire et toutes ses perversions. Pourquoi ce choix ?

J’ai voulu, au travers d’une fiction, sensibiliser le lecteur aux drames vécus par les déportés, mais en particulier à l’exploitation esclavagiste des plus valides d’entre eux, par de grandes firmes allemandes. Certaines ont en effet profité des Arbeitskommando, ces commandos de travail qu’organisaient les nazis pour alimenter l’industrie allemande en main d’œuvre gratuite, corvéable à merci. La fin du contrat de travail, c’était le plus souvent la mort et un autre déporté remplaçait immédiatement celui qui était tombé dans l’usine, d’épuisement et de malnutrition. Dans le roman, je cite le nom de grandes sociétés qui sont prospères aujourd’hui et dont nous utilisons parfois les produits, mais qui ont eu les mains sales pendant la guerre.

Je suppose que tu as vérifié tous ces faits ?

Oui, bien sûr, je ne suis pas historienne, mais j’ai fait beaucoup de recherches et lu pas mal de documents pour m’assurer que tout ce que je raconte est vrai. Je me suis informée sur les procès intentés aux nazis, l’organisation des camps, les sévices qui y ont été perpétrés et sur les entreprises qui avaient conclu un pacte avec le diable, pour servir l’économie de guerre d’Hitler, mais aussi pour faire du profit.

Tu as parlé de scénario tout à l’heure. Ton livre pourrait -il être porté au cinéma, selon toi ?

Ah ça, c’est un rêve ! C’est vrai qu’en l’écrivant, je visualisais toutes les scènes comme des scènes de cinéma ! Je voyais la caméra suivre l’intrigue dans tous les lieux que je décris dans les quartiers de Toulouse, dans la salle du tribunal et au plus profond de la montagne. Je la voyais capter les sentiments les plus terribles sur les visages d’Ilan, d’Hannah et d’Eva … et j’imaginais même les acteurs qui pourraient les incarner. On ne sait jamais, un scénariste tombera peut-être sur la Trappe !

Penses-tu déjà à un deuxième roman ?

Oui, il est en projet, mais il sera très différent de La trappe et j’ai du mal à avancer, car il est inspiré de l’histoire des femmes de ma famille de 1916 à aujourd’hui, des femmes fortes et combatives. Mais j’y crois, je m’accroche !

 

 

A propos du site : Criminocorpus propose le premier musée nativement numérique dédié à l’histoire de la justice, des crimes et des peines. Ce musée produit ou accueille des expositions thématiques et des visites de lieux de justice. Ses collections rassemblent une sélection de documents et d’objets constituant des sources particulièrement rares ou peu accessibles pour l’histoire de la justice.

Nos autres sites : REVUE

Relecture et mise en page Ph.P et S.P.

Tag(s) : #Coup de coeur du jour, #portrait du jour criminocorpus
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