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Nouveau portrait du jour de Léonie De Rudder

Culture et justice développe la rubrique Portrait du jour, ouvre ses pages aux fidèles lecteurs  et reçoit avec infiniment de plaisir Léonie De Rudder

Léonie De Rudder est scénariste de séries et de dessins animés. Vertidog est son premier roman.

Bienvenue Léonie sur le très prisé et discret Culture et justice 

 

Léonie De Rudder – Vertidog

Le pitch : Le Vertige d’un Uber-promeneur de chiens… au gré des likes et des flammes…

Comment est né ce roman ?

La première étincelle, c’était donc à San Francisco. Je traînais dans un parc et j’ai vu tous ces dog-walkers, partout, suréquipés et le personnage du promeneur de chiens déprimé s’est créé dans ma tête. J’ai d’abord écrit une nouvelle qui est comme un stade embryonnaire de ce roman. La deuxième étincelle, c’est d’avoir relu L’attrape-Cœur de Salinger. Ça m’a guidé dans la structure, l’errance de 24 heures, les rencontres de personnages-types et la sensation de ne pas trouver sa case dans la société. Ce malaise qu’on croit typiquement adolescent quand on ne s’imagine pas trouver sa place, sa « case ». Mais c’était les années 50 avec une société qui proposait des rôles et des modèles forts. Je me demandais ce qu’il en était aujourd’hui, dans une société où toutes les normes bougent (et tant mieux !) et où l’injonction dominante est de se réaliser et d’avoir une vie exceptionnelle ! Crédit photo : ©Adélaïde Yvert/Robert Laffont

Pourquoi vous avez eu envie après des années à écrire des scénarios de passer à l’écriture d’un roman d’écriture ?

Ça faisait plus de dix ans que j’écrivais pour des séries d’animation et j’avais envie de sortir de ma zone de confort, d’écrire plus long, et surtout avec d’autres registres. J’ai beaucoup écrit pour la télévision, et pour des publics jeunes avec toutes les contraintes que ça comporte. Même s’il y a une vraie liberté de genre, une fantaisie qu’on ne trouve nulle part ailleurs, je ressentais une frustration de devoir traiter toutes les situations par le rire, la dédramatisation. Moi j’ai grandi dans les années 80 et les dessins animés étaient angoissants, ça parlait d’abandon, de peur de l’avenir, de violence, de mort… J’avais aussi envie de les faire chialer, les gosses !

J’ai beaucoup erré pour « assouplir » mon écriture, je crois que mon expérience de scénariste se ressent beaucoup, mais finalement, la dérision et le côté « speed » vont plutôt bien avec les thématiques de Vertidog

Comment tu qualifierais ton roman ?

Je dirai qu’il est désespéré et j’espère : désespérément drôle

L’écriture est très contemporaine, avec des anglicismes. C’est pour quel public ?

Comme on est vraiment tout au long du récit à la première personne, dans la tête du personnage, il fallait que la narration soit très orale. J’ai eu beaucoup de doutes, notamment après qu’un éditeur ait refusé le manuscrit en disant « mais ça va intéresser qui, en dehors des franco-américains de moins de 25 ans ?» (je l’ai bien pris, car ça me rajeunissait beaucoup). Et en fait, j’ai eu de très bons retours par des lecteurs de bien plus de 25 ans, qui ne sont pas du tout immergés dans la folie et dans la culture des réseaux sociaux. Je crois que les émotions du personnage, qui cherche sa place dans une société avec des repères mouvants et fluctuants, ça parle à tout le monde… Non, ce qui m’a surprise, c’est que mon neveu de 12 ans l’a lu, et m’a écrit un sms adorable pour me dire qu’il n’avait pas pu lâcher le livre. Pour le coup je ne pensais pas que ça plairait à quelqu’un d’aussi jeune (et surtout j’avais peur que ce soit mille fois trop vulgaire pour lui…) ça m’a vraiment touchée que l’histoire l’ait embarqué.

Les réseaux sociaux sont omniprésents dans le livre. Quel regard porte-tu sur ce phénomène ?

Je pense que ça a bouleversé nos vies, nos comportements, très concrètement, dans le quotidien. Dans tous les domaines, la façon de travailler, d’avoir des relations, de s’informer, dans la façon de penser aussi. Toutes ces applis nées en Californie, pour connecter les gens, à la croisée des philosophies hippies et du capitalisme le plus effréné ont atterri dans le creux de nos mains. Moi ça me fascine. Je me suis déjà retrouvée comme mon personnage, perdue à attendre que quelqu’un me contacte où d’une idée de lieux où aller. Je voulais trouver comment traduire ça en littérature, un flux de conscience rythmé par les notifications.

Ça parle d’un truc très contemporain, mais dans un roman. Pourquoi cette forme-là, et pas un podcast ou une écriture plus hybride ?

C’était très logique pour moi, dans mon parcours d’autrice… Les livres et l’étude de l’écriture font partie de ma vie depuis l’enfance (j’ai suivi une formation très classique : hypokhâgne, khâgne, master de Lettres Modernes)… Mais oui, c’est vrai que je n’ai pas choisi d’en faire un scénario, par exemple. Rien que dans la « fabrication » du récit, je voulais procéder autrement. En scénario, je n’applique pas de recettes mais l’enchaînement des scènes est très « causal » on est presque dans une démonstration. Pour cette histoire je voulais vraiment qu’on sente l’errance, et je voulais moi-même être surprise. J’ai fait un vague plan et je m’en suis éloignée de nombreuses fois. Je me suis davantage laissée guider par le langage, par des associations d’idées, par le rythme, dans l’urgence ou dans la contemplation... Par l’écriture en elle-même.

Maintenant que ce roman est sorti est-ce que tu te sens encore scénariste ou tu changes de voie ?

Non, je reste scénariste ! Et pas seulement parce que c’est mon gagne-pain, parce que j’adore ça et qu’en ce moment je bosse sur des projets trop cool (une série « live » pour une célèbre plate-forme et des projets en animation). Pour la littérature j’ai un autre manuscrit, un peu fou, un peu baroque, qui est dans un autre genre de pop culture puisqu’on est dans un Paris du XIXème siècle, façon roman gothique ou conte fantastique. C’est une histoire que je porte depuis une éternité, bien avant Vertidog, et j’espère vraiment qu’il sera publié un jour.

 

Culture et justice rassemble des informations relatives à l’actualité culturelle sur les questions de justice. Histoires, romans, portraits du jour, salon de livres... Page indépendante sans but lucratif administrée par Philippe Poisson et Camille Lazare, membres de l'association Criminocorpus.

A propos du site : Musée - Histoire de la justice, des crimes et des peines | Criminocorpus propose le premier musée nativement numérique dédié à l’histoire de la justice, des crimes et des peines. Ce musée produit ou accueille des expositions thématiques et des visites de lieux de justice. Ses collections rassemblent une sélection de documents et d’objets constituant des sources particulièrement rares ou peu accessibles pour l’histoire de la justice."

 Relecture et mise en page Ph.P et S.P.

Tag(s) : #Coup de coeur du jour, #portrait du jour criminocorpus
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