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Nouveau portrait du jour  Christian Chavassieux

Culture et justice développe la rubrique Portrait du jour, ouvre ses pages aux fidèles lecteurs de la page et reçoit avec infiniment de plaisir Christian Chavassieux

Bienvenue Christian  sur le très discret et prisé Culture et justice

Christian Chavassieux est né en 1960 et travaille à Roanne. Ses romans sont imprégnés de notions puisées dans la littérature de SF, dont il fut toute sa jeunesse un grand lecteur. Il a reçu le prix Lettres-Frontières 2015, pour L'Affaire des vivants paru chez Phébus, un chef d'œuvre selon la romancière Alice Ferney. Il a également obtenu le prix planète Sf pour "Les Nefs de Pangée" et le label coup de poing J'Ai Lu, pour "Noir Canicule"

Christian Chavassieux est invité au salon du Polar’Encontre les 12 et 13 mars 2022 à Bon Encontre en Aquitaine (47) 

 

Christian Chavassieux répond aux questions de Pascale Chavanne, libraire qui défend son travail depuis son premier roman « Le Baiser de la Nourrice », en 2008.

Pascale Chavanne, libraire à "Jardin de Papier", à Roanne.

 

Comment êtes-vous arrivé à l’écriture ? Quel est votre parcours ?

J'écris depuis toujours, et depuis toujours sous des formes diverses. J'ai évoqué la genèse de mon travail dans « J'habitais Roanne » où il ressort que notre ville a construit mon identité d'écrivain (et non de philosophe (?), comme certains l'ont écrit). Je suppose que l'écriture correspond à mon goût pour la solitude, le travail secret et lent. Enfant, j'écrivais de vastes fresques, des récits d'aventure inspirés de mes lectures d'alors. Je lisais beaucoup, sans souci de distinguer des genres ou même des auteurs. Petit à petit, une exigence s'est faite, mon goût s'est formé. J'ai appréhendé avec plus de pertinence ce qui caractérise un style, un engagement. J'ai pris conscience que raconter des histoires n'était pas une motivation suffisante, qu'il fallait un enjeu d'ordre littéraire. Mes premières nouvelles ont été primées dans divers concours, mais j'avais en tête des récits plus amples. J'ai écrit plusieurs romans sans songer à m'auto-publier, je voulais absolument que mon travail passe le filtre professionnel d'un éditeur. Cela s'est produit tardivement, en 2008, après des années d'écriture secrète, avec « Le Baiser de la Nourrice ». Depuis, les publications s'enchaînent et j'en suis à renoncer à certaines propositions, faute de temps. Une situation que je n'osais même pas rêver il y a seulement un an.

Vous situez-vous dans une lignée ?

Je reconnais toutes les influences, mais ceux qui me lisent savent combien il est difficile de m'attribuer une ligne, une « école ». On a évoqué certain courant de la littérature espagnole pour situer mon univers. S'il fallait trouver une lignée, elle serait particulièrement tortueuse, mais elle intégrerait certainement les influences d'auteurs aussi différents que Proust, Michon, Homère, Chevillard, Hugo, Céline, King, Brussolo, Roth, Lobo Antunes, Delhaume, Rabelais, Borgès, Flaubert, etc, etc. Nous sommes tous des métis culturels.

Comment procédez-vous pour l’écriture d’un roman ?

Je rumine un projet pendant des années, jusqu'au jour où je suis prêt à entrer dans l'histoire (c'est une notion importante, être prêt, parce que vous allez devoir vivre avec ce livre pendant dix ans ou plus, si l'on cumule les temps d'écriture, de publication, les rencontres autour du livre. Il faut que vous soyez certain que ça vaut la peine d'y consacrer tant d'années de votre vie). J'ouvre un dossier, écris une note d'intention avec une date de clôture à laquelle je me tiens, et je commence. Après, il suffit de travailler sans relâche. Une bonne pratique est de laisser un roman achevé dans un tiroir et de l'oublier pendant qu'on en écrit un autre, de ne le ressortir qu'après six mois ou un an, voir comment il supporte une lecture plus distanciée, et le reprendre s'il a passé honorablement cette épreuve. J'en ai ainsi plusieurs qui n'y sont pas parvenus et resteront dans leur boîte, à jamais. Ne surtout pas considérer que tout ce qu'on écrit vaut la peine d'être publié.

Alice Ferney, journaliste et autrice, a consacré un article sur L’Affaire des vivants en évoquant « un chef-d’œuvre ». D’autres auteurs ont souligné la qualité de votre écriture et, comme l’a dit récemment l’un de vos éditeurs, beaucoup vous découvre une plume, une voix qu’on n’oublie pas. À quoi cela, dans votre travail d’écrivain, est-il dû à votre avis ?

Si c’est vraiment le cas, j’en suis très heureux, parce que je travaille beaucoup pour obtenir un certain résultat. Voyons… Ça vient peut-être d’abord d’un complexe d’infériorité. Un parcours scolaire difficile m’avait convaincu que j’étais un cancre, nul en presque tout. Quand j’ai commencé à écrire « sérieusement », je veux dire avec la perspective d’être publié, je voulais montrer que je « savais » écrire. En gros, je me suis appliqué, j’ai fait du sous-sous-Proust, avec longue syntaxe chantournée, vocabulaire rare, formes sophistiquées, etc. C’était enflé, trop malin pour être honnête, sur-écrit. Je ne le regrette pas, parce que maîtriser la phrase longue est parfois un atout. Ensuite, comme la plupart des écrivains, je me suis efforcé d’aller vers plus de simplicité et d’efficacité. Si je m’adonne au baroque, au lyrique, ce n’est plus pour masquer ma médiocrité, c’est un choix (parfois ludique : il m’arrive de glisser secrètement des alexandrins dans mes romans).

Il y a aussi le vocabulaire. J’adore cette richesse. Sans être précieux, il existe parfois un mot, rare ou ancien, qui signifie précisément ce que vous avez en tête. Vous n’avez pas le choix : c’est celui qui doit être utilisé. Pour mes romans « historiques », j’ai toujours commencé par éplucher les dictionnaires contemporains de l’époque que j’allais décrire, avant toute autre recherche documentaire. Ensuite entre en jeu la sonorité des mots, l’équilibre et le rythme de la phrase. J’ai la chance que ma première lectrice lise à haute voix, ça me permet de vérifier la musicalité du texte, essentielle pour moi. Aussi, je pourchasse les lieux communs, les images déjà vues, les métaphores habituelles. Enfin, j’en parlais plus haut mais voilà comment j’écris : aucun plan, chaque phrase m’entraîne vers la suivante. On pourrait considérer mes romans comme le cheminement de phrases qui ont fini, par accumulation et addition, par créer une histoire. Une phrase bancale peut me bloquer plusieurs jours. Je relis alors incessamment les pages qui précèdent pour comprendre en quoi elle cloche, pourquoi elle ne convient pas. Et vous savez quoi ? En général, c’est parce que cette phrase n’appartient pas à ce roman. Je ne veux pas dire que je l’ai piquée ailleurs, je veux dire qu’elle est étrangère au programme littéraire qui prévaut ici, dans ce que je suis en train de faire. Chaque roman a sa propre musique, son propre rythme, son énergie particulière. Voilà, je suppose qu’à force, ce processus induit une voix singulière.

Avez-vous des projets d’écriture en cours ?

Toujours. Plusieurs. Un court roman sur l’enfance du minotaure, une figure qui me fascine. Un roman contemporain traitant d’un fait-divers, de la BD… Prochainement - malheureusement trop tard pour l’édition 2022 de Polar’Encontre - sortiront deux romans : « Je suis le rêve des autres », chez Mu et « Mon très cher cueilleur de roses » chez Phébus. Il y a aussi, chez Glénat, le premier volume d’une BD consacrée à la conquête du Mexique : « Cortés, la guerre aux deux visages » et plus tard dans l’année, une participation à un collectif sur Proust, au Réalgar. Ma dernière pièce de théâtre, « Le sort dans la bouteille » est jouée en ce moment par la troupe « 360° » et des représentations sont prévues jusqu’en juin de l’an prochain. Tout cela, si le monde est encore là.

 

Culture et justice rassemble des informations relatives à l’actualité culturelle sur les questions de justice. Histoires, romans, portraits du jour, salon de livres... Page indépendante sans but lucratif administrée par Philippe Poisson et Camille Lazare, membres de l'association Criminocorpus.

A propos du site : Musée - Histoire de la justice, des crimes et des peines | Criminocorpus propose le premier musée nativement numérique dédié à l’histoire de la justice, des crimes et des peines. Ce musée produit ou accueille des expositions thématiques et des visites de lieux de justice. Ses collections rassemblent une sélection de documents et d’objets constituant des sources particulièrement rares ou peu accessibles pour l’histoire de la justice."

 Relecture et mise en page  Ph.P et S.P.

Tag(s) : #Coup de coeur du jour, #portrait du jour criminocorpus
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