Il fait beau, il fait même chaud à Paris, ce 31 juillet 1914, lorsque Jean Jaurès s’attable au restaurant du Croissant, rue Montmartre, juste à côté du journal L’Humanité. Ils sont une dizaine autour de lui – députés socialistes, journalistes, amis proches. Les fenêtres sont ouvertes pour laisser entrer la brise du soir.
Tous sont inquiets : la guerre frappe à la porte. Depuis l’assassinat de l’héritier du trône impérial d’Autriche Hongrie à Sarajevo, un mois plus tôt, le jeu des alliances entre États menace d’embraser toute l’Europe.
Jaurès continue à penser qu’une issue pacifique est possible : si les socialistes allemands et français s’unissent et, au besoin, appellent à une grève générale, le pire peut être évité. Il veut y croire, il a depuis toujours l’optimisme chevillé au corps.
Il est 21h40. Le rideau se soulève, une main armée d’un pistolet vise le député, installé dos à la fenêtre. Deux coups de feu claquent. Jaurès s’écroule. Une femme crie « Ils ont tué Jaurès ! ».
Plus personne, désormais, ne peut empêcher la boucherie qui s’annonce. Le 4 aout, la France entre en guerre. C’est aussi ce jour-là qu’on enterre Jaurès.
Un récit documentaire d'Odile Conseil
Invité :
Vincent Duclert, historien ; il a consacré plusieurs livres à Jaurès, dont une biographie cosignée avec Gilles Candar : Jean Jaurès (en poche chez Pluriel/Fayard, 2024)
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