Oscar du meilleur film étranger 2010, Dans ses
yeux est un thriller sur fond d’histoire contemporaine, qui débute à Buenos Aires en 1974, deux ans avant le coup d’Etat dirigé par une junte de militaires. “Ce qui
m’intéressait, c’était de m’attaquer aux années qui ont précédé la dictature”, explique la comédienne Soledad Villamil, 40 ans, qui joue le rôle d’une juge
enquêtant sur un viol suivi d’un assassinat.
“ On pense que les violences ont débuté en 1976, à la suite du coup d’Etat, mais l’utilisation de la terreur a commencé lorsque Peron est revenu au pouvoir, en 1973 ”. Dans ce film, la juge et un
enquêteur découvrent que dans ces années-là, des forces occultes avaient pris le pouvoir, doublant sans vergogne le système judiciaire. A l’instar du réalisateur Juan José Campanella, né en 1959
à Buenos Aires, les acteurs du film ont vécu la répression des années 1970. Ils évoquent des amis arrêtés, torturés ou disparus. Soledad Villamil se souvient que son père étant trotskiste, sa
famille ne cessait de déménager. “Notre adresse devait rester secrète, même de mes grands-parents.” C’est en 1946 que l’Argentine, alors neuvième puissance économique mondiale, élit le général
Juan Peron. En 1955, un premier coup d’Etat militaire le chasse du pouvoir. Peron revient en 1973 et son épouse Isabel devient vice-présidente. Le pays s’enfonce dans une guerre entre pro et
anti-peronistes qui fait plus de trente mille victimes dues aux escadrons de la mort. Le violeur et assassin du film fait partie de cette sinistre organisation. Peron meurt en 1974, sa femme lui
succède jusqu’en 1976 où la junte prend le pouvoir. En 1982 la défaite des Malouines précipite la chute de la junte. En 1983, l’élection du président Raul Alfonsin symbolise le retour à la
démocratie. C’est à ce moment-là que les deux héros du film, la juge et son enquêteur, vont pouvoir boucler une enquête qu’ils avaient ouverte en 1974. François Quenin dans Historia