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Isabelle Lasserre
02/12/2009 | Mise à jour : 21:38

Le bateau école Jeanne d'Arc, dans la rade de Brest, mercredi, en route pour sa dernière mission, qui durera six mois et l'emmènera jusqu'au Pacifique.
Le bateau école Jeanne d'Arc, dans la rade de Brest, mercredi, en route pour sa dernière mission, qui durera six mois et l'emmènera jusqu'au Pacifique. Crédits photo : AFP

François Fillon a rendu, à Brest, un ultime hommage au navire mythique de la Marine nationale.

La vieille Jeanne d'Arc, le bateau école mythique de la Marine nationale, a quitté Brest mercredi pour son 45e et dernier tour autour du monde. Pour son ultime voyage sur les mers du globe, le plus vieux bateau de guerre français, mis en service en 1964, passera un long moment en Amérique latine, après une escale africaine et un retour par le port de New York. Avec, à son bord, 585 marins, dont 104 jeunes officiers. Une page entière de la marine française s'est refermée mercredi, en présence du premier ministre François Fillon, venu rendre un dernier hommage à un navire que tout le monde regrette déjà. Car, pour la première fois depuis 1912, la Jeanne n'aura pas de successeur sur les mers.


En quarante-cinq ans, ce porte-hélicoptères de 182 mètres de long, l'un des fleurons de la «Royale», la Marine nationale, a parcouru 3,2 millions de kilomètres. «C'est plusieurs fois la distance de la Terre à la Lune», rappelle un marin. L'énorme navire construit à Brest entre 1959 et 1961, a formé 6 400 aspirants dans sa longue vie.


Connue dans le monde entier, notamment pour les prestigieuses réceptions organisées sur son pont d'envol au cours des 800 escales comptabilisées dans sa carrière, la Jeanne a accueilli presque tous les grands de ce monde. Du roi du Maroc au président brésilien, de Léopold Sédar Senghor à Fidel Castro. Depuis qu'elle existe, les présidents français ont tous posé le pied un jour sur ce navire hors norme. «Tous, sauf Nicolas Sarkozy» précise, déçu, un marin.


Moins connue sans doute que les porte-avions Clemenceau et Charles de Gaulle, on la considère aussi plus accessible. «Contrairement aux porte-avions dont le symbole guerrier peut dégager une certaine agressivité, un bateau école, même si c'est un navire de guerre, évoque plutôt la paix», explique un spécialiste.

Soutien aux victimes du tsunami

Outil diplomatique véhiculant aussi, de par son nom, le patriotisme français, la Jeanne, tout en formant les jeunes officiers, s'est toujours rendue utile là où elle le pouvait en participant aux opérations, faisant grande impression avec ses hélicoptères, ses missiles Exocet et ses canons. Elle a ainsi été sollicitée, ces dernières années, pour soutenir les victimes du tsunami en 2004-2005 et aider à la libération des otages du Ponant en 2008 dans le golfe d'Aden, au large de la Somalie.


Et pourtant, la Jeanne d'Arc ne sera pas remplacée. Faute de moyens financiers, pour la première fois depuis 1912, la Marine doit renoncer à avoir un bateau dédié à la formation. Le concept - «naviguer loin, longtemps et en équipage» - demeurera. De même que l'école continuera à s'appeler la Jeanne d'Arc, pour la force symbolique et historique du nom. Mais ce sont différents bâtiments qui se relaieront chaque année pendant six mois, en fonction de leur disponibilité, pour former les jeunes officiers sortant de l'École navale. Ce qui permettra au passage aux élèves officiers d'être instruits sur des navires ultramodernes, équipés des dernières technologies, alors que la Jeanne, qui se faisait vraiment vieille, «n'était plus dans le coup depuis longtemps», reconnaît le spécialiste, malgré plusieurs liftings et opérations de rafistolage.


Une fois ce dernier périple à travers les océans terminé, la Jeanne et ses 10 000 tonnes de structure partiront, comme le Clemenceau, à la casse pour être désamiantés et déconstruits, à l'issue d'un appel d'offres européen. Une entreprise britannique, moins chère que les autres, s'est d'ores et déjà placée sur les rangs il y a plusieurs mois. Mais cette solution, économiquement intéressante, fait grincer les dents de nombreux marins. Comment pourrait-on en effet livrer la carcasse de la mythique Jeanne aux Anglais, qui ont brûlé la Pucelle d'Orléans en 1431 ?

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