Il y a cinquante ans, la France quittait l'Indochine, naguère qualifiée de " joyau de l'Empire
".
Ce départ s'est fait dans la douleur, sans gloire particulière, après huit années d'une guerre pénible achevée par l'ultime et prévisible désastre de Dien Bien Phu. La Quatrième République a mené
et justifié de bout en bout cette guerre. Le monde politique, du Mrp à la majorité du Parti socialiste Sfio, l'a soutenue ou, pour le moins, tolérée. Mais des voix se sont élevées pour protester,
des hommes se sont mobilisés pour lutter.
Henri Martin fut de ceux-là. Durant trois années, ce jeune militant communiste sera emprisonné pour avoir, simplement, demandé la liberté pour le peuple vietnamien, la cessation de la " sale
guerre " que lui imposait la France officielle. Ce déni de justice a été baptisé par certains, Affaire Dreyfus de la IV- République. Pour défendre Henri Martin, les organisations communistes, au
premier rang, ont multiplié les initiatives.
Mais, au-delà, une masse considérable de femmes et d'hommes de bonne volonté ont uni leurs efforts. Certains grands intellectuels, comme Jean-Paul Sartre, ont également élevé la voix. D'autres
emprisonnements, comme celui de Raymonde Dien, ont soulevé des tempêtes de protestations. Au début de l'année 2004, plusieurs centaines d'acteurs (au premier rang desquels Henri Martin et
Raymonde Dien) et de témoins se sont retrouvés, ont croisé leurs souvenirs avec l'analyse des historiens de la période.
Il en a résulté une passionnante journée où l'émotion, toujours vive, s'est mêlée au travail historique sur la mémoire et à la réflexion politique sur la notion d'engagement. C'est le fruit de
cette rencontre que les éditions Le Temps des Cerises sont fières de présenter aujourd'hui.
Alain Ruscio , Henri Martin , Raymond Aubrac , Axelle Brodiez , Collectif
Broché
Paru le : 19/03/2005
Éditeur : Temps des Cerises (Le)
Au matin du 14 Mars 1950, une rumeur court dans les quartiers populaires du port de Toulon.
On aurait arrêté, la nuit précédente sept jeunes marins coupables d’avoir agi contre la guerre d’Indochine.
On parle même de sabotage.
Très vite les choses sont confirmées par les autorités. Parmi les jeunes marins (deux seulement passeront devant le tribunal militaire) l’un deviendra bientôt un symbole pour la jeunesse. Il
s’agit d’Henri Martin.
Il est enfermé à la prison maritime.
L’affaire Henri Martin commence.
La Résistance
Né en 1926 à Rosières , petite cité industrielle du Cher, Henri Martin est issu d’une famille modeste, son père est ouvrier aux fonderies de la ville. Les études primaires terminées, il apprend
le métier de mécanicien..
En 1943 jeune ouvrier, il n’a pas encore 17 ans, révolté par l’ occupation nazi, Henri Martin prend contact avec la Résistance.
Il distribue des tracts, camoufle des armes, assure des liaisons avec le maquis. Il rejoint alors les FTP du Cher et participe à la libération du département.
C’est là qu’il adhère au Parti Communiste Français. Le 14 Novembre 1944 il se porte volontaire pour aller combattre sur le front de Royan, la dernière poche nazi dans la France
libérée.
Le 1er Février 1945 il s’engage dans la marine. Le Japon occupe encore l’Indochine et une campagne est lancée par les autorités.
Des affiches clament en direction des jeunes; "Français tu dois délivrer l’Indochine de l’hydre japonaise" ou encore "Français, l’Indochine est captive".
Ainsi, le 5 Octobre 1945, Henri Martin est affecté à l’aviso Chevreuil qui appareille pour l’Indochine le 16 et en Novembre arrive à Haïphong.
L’honneur du marin
Là, peu à peu, la réalité s’impose à lui, c’est une guerre de reconquête coloniale, la France ne combat pas les japonais mais les vietnamiens dans leur propre pays.
Et surtout il découvre chez les vietnamiens le même sentiment qui l’avait poussé , lui, à entrer dans la résistance: le patriotisme.
Lors de son procès à Toulon, Henri Martin dira à ses juges: "j’avais 16 ans quand j’ai commencé à distribuer des tracts qui appelaient la population de mon village à lutter contre l’occupant.
Après avoir combattu les armes à la main dans les maquis du Cher, j’aurai pu rentrer chez moi. J’avais 17 ans. Je ne l’ai pas fait. Je suis allé sur le front de Royan. Là, j’avais un capitaine de
24 ans qui savait conduire des hommes. Il est tombé face à l’ennemi, le 3 Décembre 1944. avant de mourir il nous a dit : "les gars il faut lutter jusqu’au bout pour la justice et la liberté."Je
tiens cet engagement aujourd’hui encore en me battant contre la guerre injuste du Viêt-Nam. ce faisant je défend mon honneur de marin."
5 ans de bagne
L’accusation de sabotage sera abandonnée, mais le 19 Octobre Henri Martin sera condamné
à 5 ans de réclusion.
Ce procès sera cassé et un autre se déroulera à Brest. Finalement Brest confirmera le verdict de Toulon.
C’est alors que la campagne pour sa libération prendra de l’ampleur. Les multitudes d’initiatives, sous des formes mille fois différentes, la pression constante auprès des plus hautes autorités
ont fait de la campagne pour la libération d’Henri Martin, un des plus grands moments de la lutte pour la Paix au Vietnam.
Il sera libéré au bout de 41 mois, le 2 Août 1953.
Le second maître Henri MARTIN