« Dieulefit, le village des Justes », documentaire d'A. Fronty et G. Loiret, documentaire diffusé sur la LCPle vendredi 1er octobre 2010 à 21heures.
Document 2008 - Deux mille cinq cents personnes habitaient Dieulefit, un village parmi d'autres en Drôme provençale. Quand la guerre éclata. A l'école de Beauvallon, les 'directrices accueillirent aussitôt les enfants juifs. Et leurs parents, bientôt. À la mairie, une employée d'une vingtaine d'années commença à fabriquer des faux-papiers. D'autres réfugiés arrivèrent, des anonymes, mais des peintres, des poètes, des artistes et des philosophes encore. Et d'autres maisons s'ouvrirent. A l'école, les enfants se serrèrent un peu plus sur les bancs, et la secrétaire de mairie devint une faussaire patentée. La population grimpa jusqu'à cinq mille personnes. Le bourg accueillait ainsi autant de pourchassés qu'il comptait de natifs. Pas un seul ne sera arrêté. Nul ne sera dénoncé. Pendant les quatre années les plus sombres de notre histoire, ce petit village devint la " capitale intellectuelle de la France ", disait Pierre Vidal-Naquet qui s'y réfugia, enfant. Dieulefit sut désobéir, dire non aux lois iniques. Dieulefit, ou le miracle du silence
Anne Vallaeys a recueilli les témoignages des enfants d'alors, à Dieulefit elle a rencontré des hommes et des femmes aussi résolus qu'hier, elle a consulté les archives. Son talent d'écrivain a fait le reste. Elle a reconstitué cette aventure collective aussi extraordinaire que méconnue, pas d'héroïsme, non, mais une manière d'être. Les Dieulefitois préfèrent parler d'humanité, tout simplement
Anne Vallaeys (Auteur)
-
Broché: 247 pages
-
Éditeur : Fayard (27 février 2008)
-
Collection : LITT.GENE.
Archives de presse 2008 - Avec son nom prédestiné, cet adorable village de pierres chaudes blotti au cœur de la Drôme respire la paix et le repos. Pourtant, si l'on en croit l'historien Pierre Vidal-Naquet, «Dieulefit fut sous l'Occupation une des capitales intellectuelles de la France», ce que confirmera Louis Aragon, au point de mériter le titre de «pays des Justes». De 1940 à la Libération, de nombreux enfants et intellectuels juifs, ainsi que des communistes ou des républicains espagnols, y trouvent en effet refuge. Aux marches du Dauphiné, à la frontière nord de la Provence, là où l'olivier disparaît pour laisser la place au chêne ou au châtaignier, le bourg cultive depuis des siècles une tradition de tolérance qui a permis à la majorité catholique et à la forte minorité protestante de vivre en bonne intelligence. Deux places centrales, celle de l'Eglise et celle du Temple, matérialisent cet esprit de partage.
© DR
L'école de Beauvallon, créée par des filles de pasteurs,
où enseigneront des réfugiés allemands, polonais ou français.
C'est dans ce contexte que prend naissance une prodigieuse aventure, patiemment reconstituée par Anne Vallaeys dans son livre Dieulefit ou le miracle du silence (Fayard). Sous le régime de Vichy, des filles de pasteurs, qui s'étaient consacrées aux enfants difficiles, décident de prendre la défense des persécutés en fondant l'école de Beauvallon, où enseigneront des réfugiés allemands, polonais ou français. Pol Arcens, catholique breton, ouvre de son côté l'école la Roseraie. Tous fabriquent des faux papiers et inventent des noms d'emprunt pour leurs protégés, enfants ou adultes. Un havre de solidarité se constitue en silence. On verra ainsi passer à Dieulefit, outre Aragon et Pierre Vidal-Naquet, Clara Malraux, Pierre Seghers, Emmanuel Mounier, la pianiste Yvonne Lefébure.
© DR
Au centre, Marguerite Soubeyran, l'une des fondatrices, en 1943.
De quoi justifier le titre de «pays des Justes», selon la procédure et les critères initiés par la Fondation Klarsfeld et par le mémorial Yad Vashem, à Jérusalem, si la distinction était finalement accordée. Le dossier est en cours de constitution et l'association qui s'en occupe espère vivement que la France pourra bientôt compter un deuxième «pays des Justes», après Le Chambon-sur-Lignon, qui est à ce jour la seule commune de France à avoir reçu cet honneur (qu'elle ne partage en Europe qu'avec une autre ville des Pays-Bas). La lecture du récit d'Anne Vallaeys affranchira tous ceux qui ignorent cette magnifique page d'histoire.
Par Christian Makarian, publié le 27/02/2008 - mis à jour le 27/02/2008 14:28
http://www.lexpress.fr/actualite/societe/histoire/le-village-miraculeux_473234.html