Mis en ligne le 17/10/2008
Trois voix alternées pour un livre qui fait mal. Trois voix distinctes et pourtant réunies par une même circonstance. Trois voix pour trois personnages qui s'expriment séparément, s'expliquant sur leurs raisons et s'interrogeant sur leurs déraisons autour de l'avortement voulu par l'une, alors qu'une exécutante est en attente de la peine de mort pour laquelle le bourreau a été convoqué. Trois êtres entre obscurité et lumière, entre certitudes et doutes avec, au bout, la tragédie annoncée. On est en 1943. Tout se passe entre le matin du 29 juillet et l'aube du lendemain. C'est le cinquième roman de Valentine Goby. Comme le précédent, "L'échappée", il se situe dans le temps meurtrier de la guerre, alors que les femmes n'ont pas encore le droit de vote, ni aucun droit sur elles-mêmes. Sur trois registres, "Qui touche à mon corps je le tue" au titre délibérément provocateur pose la question des antécédents et hasards d'existence des uns et des autres et interroge le droit de vie et de mort que chacun s'attribue sur autrui.
Les faits sont bruts, voire brutaux. Ils questionnent plus qu'ils n'apportent de réponse. Dans une chambre d'appartement à Paris, une femme, Lucie L., attend seule que son corps expulse le fœtus dont elle ne veut pas, l'arrachant à elle-même au mépris de sa propre vie. Dans le même temps, Marie G. appréhende, dans sa cellule de prison de la Petite-Roquette, la mort à laquelle le tribunal l'a condamnée pour avoir pratiqué des avortements. De blanchisseuse devenue "faiseuse d'anges" presque par hasard et sans y avoir vraiment réfléchi, elle éclaire des pans de sa vie, cette vie qui l'a conduite là où elle est. Henri D. qui a pour prénom Jules Henri et sans doute pour modèle Jules-Henri Desfourneaux, c'est le bourreau. Exécuteur des missions de l'Etat. En réalité, un homme ordinaire qui vit dans un environnement ordinaire et n'a fait que suivre la tradition de la lignée de sa femme où l'on décapitait de père en fils. Il n'aime pas son boulot et ne veut surtout pas savoir à qui il tranche la tête, ni décider de leur culpabilité. Il applique les décisions. Il obéit aux ordres.
NOIRCEUR ET ÂPRETÉ
Au fil de la nuit, les trois personnages sont rongés par la douleur et révèlent leur part d'humanité en exhumant leurs souffrances personnelles qui se répondent de loin en proche. On est dans un livre sombre. Mais dans la noirceur et l'âpreté de leurs réflexions, les trois personnages font émerger des lueurs. De ces lumières qui font voir ce qui demeure caché aux autres. De ces lumières qu'ils portent en eux en dépit de leurs peurs et de leurs fragilités. Lumières vacillantes que chacun diffuse tant bien que mal. Celles de Lucie qui voudrait se retrouver "libre et seule prisonnière de ce que j'ai fait". Celles de Marie G. qui rêve de l'unique belle chose qu'il lui semble avoir accomplie : ses enfants auxquels pourtant, faute d'oser avouer la vérité, on dira que leur mère est morte de maladie. Celles du bourreau qui a horreur de la nuit précédant l'exécution et se répète qu'il n'existe que par le dégoût qu'il inspire : "Je ne sais pas si c'est mieux qu'être rien, ou que mourir".
En phrases courtes et drues, dans un style rythmé et empreint de subtile poésie mais parfois ardu à force de réserve, Valentine Goby jette une lumière crue sur l'univers de deux femmes et un homme, bousculant les convictions vite faites, posant à travers chacun la question des responsabilités et du passé que l'on porte. - Monique Verdussen
Qui touche à mon corps je le tue
Roman (broché). Paru en 08/2008
www.youtube.com/watch?v=xguIttv8h4U8
sept. 2008 - 6 mn - Ajouté par fnac
Valentine Goby - Qui touche à mon corps je le tue. fnac. Subscribe ... You need Adobe Flash Player to watch ... |
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