L'histoire des « calots bleus » appartient aux heures les plus sombres et les plus méconnues de la guerre d'Algérie. À partir de décembre 1959, alors que le conflit entre la France et le Front de libération national (FLN) a franchi la Méditerranée et que les attentats se multiplient à Paris, le préfet de police Maurice Papon met en place une unité d'intervention arabo-kabyle dont la mission est de contrer les activités des indépendantistes algériens. Dirigée par le capitaine Raymond Montaner, cette force de police auxiliaire (FPA), parfois surnommée «les harkis de Paris», va mener une véritable guerre psychologique et militaire contre les hommes et les structures du FLN, et ce jusqu'aux accords d'Évian de 1962. C'est la réalité de cette «bataille de Paris», sa forme souvent souterraine, ses moyens parfois extrêmement violents et ses enjeux que restitue l'ouvrage de Rémy Valat.
Document apportant un éclairage inédit sur un épisode polémique de la guerre d'Algérie, Les calots bleus et la bataille de Paris s'appuie sur des centaines d'archives jamais exploitées et sur les témoignages d'anciens membres de la FPA et d'agents des services du renseignement français. Une contribution historique sans a priori idéologique qui revient aussi sur les événements tragiques d'octobre 1961 à Paris et propose une analyse détaillée des méthodes de la guerre subversive et du contreterrorisme pendant ces années troubles.
Le 14 juin 1830, les soldats français débarquaient dans la baie de Sidi-Ferruch. 130 ans après, le 2 juillet 1962, l’indépendance de l’Algérie était reconnue. Le 8 juillet 1962 , débute à travers l’Algérie le massacre de plus de 100 000 supplétifs de l’Armée française (harkis). En métropole, d’autres algériens ont été des supplétifs de la Police française. Ils constituaient la Force de Police Auxiliaire. Notre collaborateur Rémy Valat dans son ouvrage « Les calots bleus et la bataille de Paris. Une force de police auxiliaire pendant la guerre d’Algérie » prend leur défense. Rémy Valat est historien. Il était archiviste à la Préfecture de Police de Paris et a classé les archives de Maurice Papon entre 1998 et 2010.Métamag.
En France, la pensée manichéenne catalogue toute personne traitant de la thématique « harki » comme un agent du « front national », un « rouge-brun », un « sarkozyste » ou que sais-je encore. Ne peut-on pas être un citoyen, tout simplement ? Cet article est une partie de ma réponse aux critiques dont ont fait l’objet les policiers auxiliaires. Cette réponse est développée et argumentée dans mon ouvrage (Les calots bleus et la bataille de Paris. Une force de police auxiliaire pendant la guerre d’Algérie), disponible à quelques exemplaires et, quasiment épuisé chez mon éditeur, je n’en fais donc aucune promotion à des fins commerciales.
Tout ce que j’ai écrit –et ce que j’écris- s’appuie sur des documents, je n’invente rien. Mon opinion est que la France, comme tous les États dans le monde, subit les effets de la mondialisation libérale. Nous connaissons une phase de transition, et par conséquent de doutes, et c’est pour cela, que des « historiens », mettent à profit cette faiblesse... Le sujet sur l’ « identité nationale » n’est pas un vain mot, je pense. Les historiens français ont largement fait la part des choses concernant les « responsabilités françaises ». Maintenant il faudrait se pencher sur celle de notre ancien adversaire et « ami » : le gouvernement algérien, émanation du FLN. Car ceci crée un malaise que je comprends aisément. Mais les idées les plus justes ne se formulent pas par des slogans.
On a souvent argué des responsabilités de Maurice Papon mais je me pose aussi des questions sur une personnalité, fréquemment citée dans les publications sur l’Algérie contemporaine, à savoir Monsieur Ali Haroun, membre de l’exécutif de la fédération de France du FLN et décisionnaire du lancement de la guerre civile algérienne en métropole. Ce conflit aurait fait 3 957 tués, 7745 blessés pour un total de 10 223 attentats pour la période du 1er janvier 1956 au 23 janvier 1962 sur le sol national, selon les statistiques officielles. Pour le seul département de la Seine, j’ai relevé 1 433 tués et 1 726 blessés entre le 1er janvier 1956 et le 31 décembre 1962.
De l’autre côté de la Méditerranée, la « guerre de libération » reste probablement l’unique source de légitimité du gouvernement algérien à bout de souffle ? En 1991, année cruciale en Algérie, le mouvement de grève initié par le Front islamique du salut est sévèrement réprimé par le gouvernement et bon nombre des manifestants sont envoyés dans des centres d'internement dans le désert saharien. L'application du respect des « droits de l'homme » (en Algérie, le sens est un peu différent du nôtre) au bénéfice des manifestants détenus dans les camps algériens a été confiée à un ministre chargé spécifiquement de ces questions, devinez qui ? Ali Haroun, un professionnel du répressif. L’indéniable collusion entre l’avocat et la dictature militaire en Algérie a été développée dans l’ouvrage de Lounis Aggoun et Jean-Baptiste Rivoire, Francalgérie, crimes et mensonges d’État. D’après les sources citées, cela ferait beaucoup de sang sur les mains, d’autant que cette personnalité a été très probablement partie prenante dans la décision du lancement des manifestations d’octobre 1961, avec pour désir d’aboutir à une répression féroce.
De quoi précisément accuse-t-on les policiers auxiliaires ?
Tout d’abord l’usage de la torture. L’usage de ce terme n’est pas innocent, car la torture est à la fois moralement inacceptable et interdite par les conventions internationales. Selon Emmanuel Blanchard et Neil Mac Master, je minimiserais dans mon ouvrage les violences commises sur les militants du FLN. Cette critique hâtive fait abstraction des problèmes disciplinaires qu’a connus la FPA (Force de Police Auxiliaire). Emmanuel Blanchard remarque, très justement, que l’appellation de « bataille de Paris » (au même titre que la ≪ bataille d’Alger ≫) donnée aux opérations de police et aux combats survenus dans les rues de Paris, résulte d’un choix politique des pouvoirs publics pour édulcorer les violences policières. Cependant, dans les deux cas, il convient de conserver cette appellation, car elle est plus proche de la réalité des faits.
Selon Monsieur Blanchard, « les opérations d’envergure contre la FPA étaient donc surtout symboliques. Elles ressortissaient, selon lui, à une logique de marquage territorial et n’étaient que secondairement destinées à affaiblir des unités dont les locaux étaient trop soigneusement gardés pour que leur défense soit affaiblie par des commandos peu aguerris ». Ce n’est pas exact. Ces attentats perpétrés par le FLN relèvent certes d’un symbolisme politique (argument que l’on retrouve en octobre 1961) mais ces agressions n’en demeurent pas moins des actes de guerre, vécus comme tels par les acteurs au quotidien. Les stratégies misent en place par les belligérants, la série d’attaques menées par les groupes armés contre les forces de l’ordre, et la FPA en particulier, sont des actions militaires conduites dans le cadre d’un conflit de basse intensité. C’est pourquoi l’appellation de bataille est mise entre guillemets : il s’agit ici d’un affrontement conduit dans un cadre non conventionnel, mais qui reste de nature militaire. La ≪ bataille de Paris ≫, donc, débordait largement du cadre commun des opérations de police, celles-ci n’étant qu’une des facettes de l’affrontement. Rappelons au passage qu’au début des années 1960, la conception occidentale de la guerre connaît une phase de transition s’émancipant du modèle des conflits conventionnels pour aboutir à son caractère multiforme actuel, que l’on pourrait qualifier de ≪ hors limites≫. Éluder les aspects militaires de cette lutte est une contre-vérité, visant à marquer la disproportion qu’il y aurait eu entre la répression et les manifestations du nationalisme algérien à Paris.
De gauche à droite : Raymond Montaner, Constantin Melnik et Maurice Papon
Au sujet de la torture, celle-ci, était l’apanage des deux camps et ces moyens sont consubstantiels au terrorisme et au contre-terrorisme. Les militants du FLN en usaient pour obtenir des renseignements, mais aussi et surtout pour le châtiment des « traîtres », avant leur exécution. En revanche, les pressions physiques et morales, parfois très dures, exercées par les supplétifs visaient exclusivement l’obtention de renseignements. Seule une fraction des hommes interpellés tentait de résister à la pression des agents interrogateurs. Pour ces derniers, les moyens de coercition montaient en puissance en fonction de leur résistance et des enjeux. La seule exception aurait été, selon le témoignage du lieutenant-colonel Raymond Montaner, les collecteurs de fonds : ces derniers étaient fréquemment rossés dans un but d’action psychologique. Le message adressé a la population algérienne subissant la pression physique de ces collecteurs (de la violence physique, le tarif de base à l’exécution sommaire) visait à démontrer précisément la réversibilité des violences. En un mot, l’arroseur arrosé !
Pour ce qui concerne les militants de l’organisation spéciale (OS) arrêtés pendant l’hiver 1961 les chefs de section de la force de police auxiliaire ont été confrontés à des patriotes courageux. L’OS était une émanation de l’armée de libération nationale (ALN) et ses membres étaient des combattants plus expérimentés que la moyenne des militants des groupes armés locaux. L’engagement de cette formation paramilitaire atteste d’une part, de l’intérêt porté par le FLN à l’action de la FPA dans Paris, et d’autre part, de la volonté de l’organisation clandestine de lui porter atteinte militairement (et non symboliquement). Les violences étaient ciblées, aucunement systématiques, s’intégrant dans un système institutionnalisé de recherche du renseignement en profondeur. Les rapports médicaux produits à l’époque par l’administration attestent de la dureté des coups reçus. Bon nombre de pratiques ont aussi été inventées dans un but de propagande. La nature des lésions constatées par des professionnels confirment les passages à tabac, mais ne permettent pas d’affirmer le recours à d’autres formes de violences, menées avec sadisme ou acharnement. Replacés dans leur contexte et mis en perspective avec ceux commis par les adversaires directs de la force de police auxiliaire, ces actions prennent une autre dimension. Enfin, le témoignage du lieutenant-colonel Montaner- qui ne minore rien et assume ses décisions et actes – est en totale adéquation avec l’analyse scientifique des faits. Le témoignage initial de cet officier était pour moi, un témoignage comme un autre et il était sujet à caution comme tout autre témoignage, jusqu’à ce qu’un faisceau d’indices me permettent d’accepter, comme plausible cette version des faits.
La « nuit noire » du 17 octobre 1961
Les journalistes parlent souvent de « marronniers » pour un sujet qui revient tous les ans à la même date (pour une fois que cette profession se critique d’elle-même). On connaît les responsabilités de la police parisienne, la littérature abonde à ce sujet. Chaque année on a droit à des fleurs, le geste est beau, fort, symbolique... Mais est-il vraiment sincère ? À qui profite le crime... À trop ressasser les mêmes contre-vérités sur les responsabilités françaises (réelles), on oublie que la guerre comme l’amour se vit à deux. Les donneurs d’ordre de cette manifestation sont-ils blancs comme neige ? Permettez-moi d’en douter.
Stelle aux FPA morts en service commandé pour la France
Les circonstances et les enjeux de pouvoirs internes au FLN qui ont conduit au déclenchement des manifestations du 17 octobre 1961 sont désormais connus, grâce aux travaux de Neil Mac Master. Cette analyse néglige cependant l’importance des aspects militaires. Le couvre-feu décrété par Maurice Papon coïncide avec une amplification de l’action des services de police contre les groupes paramilitaires du FLN en totale décomposition, notamment grâce à la série d’arrestations conduites par la force de police auxiliaire. Privé progressivement de son appareil de combat, le seul moyen disponible pour sensibiliser à sa cause l’opinion publique métropolitaine et internationale passait par une démonstration collective publique susceptible de dégénérer en violences. Le rayonnement politique du FLN se fondait alors sur sa représentation aux Nations unies et par sa forte présence en métropole. Pour ne pas perdre le contrôle de sa base – notamment de ses groupes paramilitaires, le comité fédéral a été mis en demeure par l’exécutif parisien de précipiter les événements et de suspendre ses attaques contre les forces de l’ordre. Cette initiative, spontanée, prise sans l’assentiment du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), résulte aussi des tensions internes et des intrigues pour le pouvoir qui déchirent le FLN en vue de la prise de contrôle politique après l’obtention de l’indépendance. Le comité fédéral aurait joué cette carte dans l’optique de rappeler au GPRA son poids politique et mettre en évidence le soutien qu’il reçoit des immigrés algériens de métropole.
C’est pourquoi, Mohamed Zouaoui et ses trois contrôleurs, décident en pleine connaissance de cause, le 7 octobre 1961, de lancer 20 000 manifestants sur le pavé parisien pour protester contre le couvre-feu décidé l’avant-veille par le préfet de police. L’itinéraire des cortèges nocturnes n’est pas innocent, il vise des lieux symboliques (oui) de la capitale (dont la préfecture de police et les Champs-Elysées en raison de leur proximité avec le palais présidentiel) : c’est un choix prémédité de manière à susciter une réaction optimale des forces de l’ordre. La fédération de France du FLN, ne pouvait ignorer l’état d’exaspération des policiers et de sa base militante à l’automne 1961, et d’ailleurs ≪ pressentait ≫ la virulence de la répression. Des rapports internes du FLN l’attestent. Pourquoi alors persévérer sciemment dans cette voie ? Par démarche martyrologique certainement.
Sans diminuer l’ampleur des violences policières, il convient de constater qu’en dépit de leur virulence et de leur gravité, aucune femme et aucun enfant, pourtant délibérément placés en tête des cortèges, n’ont péri En définitive, il est permis de considérer la manifestation du 17 octobre 1961 comme une manifestation pacifique sur la forme, mais pas sur le fond : il s’agissait, je le répète, d’une action de guerre subversive visant à occasionner la mort de quelques dizaines d’innocents sous les coups de la police afin d’en médiatiser l’événement.
Face à un terrorisme qui s’affranchit des lois conventionnelles de la guerre, l’État républicain doit en toutes circonstances veiller à la sûreté de ses citoyens, et pour remplir cette mission défensive régalienne, l’État peut légitimement - lorsque ses intérêts vitaux et sa population sont menacés - s’affranchir momentanément des considérations morales susceptibles d’entraver son action. Si l’on jette notre regard sur d’autres conflits coloniaux, nous constatons des similitudes dans la lutte contre les menées jugées subversives : création d’un statut juridique de la population aspirant à s’émanciper, refus du statut de combattant aux militants nationalistes, création de formations spécialisées de recrutement local.
L’organisation des manifestations d’octobre 1961 est à considérer comme une des responsabilités majeures de la fédération de France du FLN. Sur ce sujet, la protection de la population qu’elle représentait – et volontairement mise sous les coups de la ≪ répression ≫ - n’était pas la préoccupation principale des dirigeants nationalistes. Cette mise au point est nécessaire pour une écriture « apaisée ≫ de la guerre d’Algérie, écriture de préférence à confier à des historiens ne confondant pas militantisme et Histoire. Ces Historiens doivent travailler librement sur toutes les archives du FLN. Puisqu’il est question d’un « massacre d’État » et que des doutes subsistent sur les responsabilités algériennes, pourquoi ne pas constituer une équipe d’historiens français et algériens qui pourraient se pencher sur cette question, à partir de cette documentation ?
Les boîtes d’archives de la préfecture de police sont rouges, de quelle couleur sont les cartons des archives de la fédération de France du FLN conservées en Algérie ?
PLAIDOYER EN DEFENSE POUR LES CALOTS BLEUS ...
17 octobre 1961 - guerre d'algerie jour par jour
Constantin Melnik, figure des services secrets français - Le ...
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Il y a 2 jours - Publié par Philippe Poisson. Constantin Melnik, figure des services secrets français · Constantin Melnik, figure des services secrets français.