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Beaucoup d’idées fausses et de fantasmes circulent à propos des bourreaux de la fin du Moyen Âge et de l’Ancien Régime (XIIIe-XVIIIe siècle). Ainsi, dans l’imaginaire collectif, alimenté en particulier par la bande dessinée, la littérature, les séries de télévision et le cinéma, le bourreau est souvent associé à une justice impitoyable et cruelle. En l’occurrence, on imagine souvent que les bourreaux d’avant la Révolution, – souvent représentés cagoulés, habillés en rouge et tenant une hache dans les mains –, étaient les terribles exécutants de tribunaux eux-mêmes très rudes qui appliquaient abondamment la peine capitale et la torture. Pourtant, la réalité historique est tout autre ou du moins un peu plus complexe. L’étude des bourreaux en Touraine au XVIIIe siècle permet du reste de s’en convaincre. Ainsi, lorsque l’on examine en détail quelle était réellement la nature exacte des activités de ces derniers au cours du siècle des Lumières, et par là même leurs revenus, les poncifs sont mis à mal. En revanche, de manière beaucoup moins fondamentale, la légendaire mauvaise réputation des bourreaux – et de leur entourage, en particulier les « valets » – est en grande partie corroborée par les sources. Ainsi, en Touraine comme ailleurs, le prélèvement du droit de havage – jusqu’à sa disparition au milieu des années 1770 – était un important sujet de crispation et de tension avec nombre de marchands et d’habitants. De plus, dans leur vie de tous les jours, les bourreaux étaient rarement des maîtres de vertu. On pourra le comprendre en découvrant les nombreux écarts de l’un d’eux, Gilles-François-Nicolas Berger, un homme qui appartenait pourtant à une grande « dynastie » de bourreaux. Et sans doute aussi une des plus longues de l’histoire – bien plus longue en tout cas que celle des célèbres Sanson. En l’occurrence, dans l’une des branches de la famille Berger installée en Touraine du milieu du XVIIe siècle à la Révolution (et ensuite dans le reste de la France), on a été bourreau de père en fils durant huit générations – peut-être même neuf – le dernier exécuteur de la lignée ayant terminé sa carrière en Algérie en 1956 !

Bibliographie :

Ardouin-Weiss (Idelette), Les exécuteurs des sentences criminelles en Touraine (1636-1853), La Membrolle, Centre généalogique de Touraine, 1988 (1ère éd. 1982), 41 p. Armand (Frédéric), Les bourreaux en France. Du Moyen Âge à l’abolition de la peine de mort, Paris, Perrin, 2012, 332 p. Boucher (André), « Exécuteurs des hautes œuvres et bourreaux chinonais », Bulletin des Amis du Vieux Chinon, tome VII, n°3, 1969, p. 293-301. Delarue (Jacques), Le métier de bourreau. Du Moyen Âge à aujourd’hui, Paris, Fayard, nouvelle éd. revue et augmentée, 1989 (1ère éd. 1979), 439 p. Demorest (Michel et Danielle), Dictionnaire historique et anecdotique des bourreaux, Gens de justice, Maison-Alfort, 1996, 446 p. Mauclair (Fabrice), La justice des Lumières. Les tribunaux ordinaires en Touraine au XVIIIe siècle, Tours, Presses Universitaires François Rabelais, 2019, 448 p. Mauclair (Fabrice), « Les bourreaux et la torture en Touraine au XVIIIe siècle », Bulletin de la Société Archéologique de Touraine, tome LXV, 2019, p. 97-108. Mauclair (Fabrice), Crimes et justice en Touraine au XVIIIe siècle, Avon-les-Roches, Éditions Lamarque, 2020, 221 p.

Tag(s) : #Justice - Peine de mort - Expertises
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