Je n'avais plus envie de quitter ces hommes

5 Septembre 2009

Convoyeuse médicale pour l'armée de l'air, Geneviève de Galard reste bloquée à Dién Bién Phu. Elle devient la seule Européenne du camp retranché. Elle vient de publier Une femme à Dién Bién Phu (Editions du Rocher).

En Indochine, nos missions aériennes ont lieu deux fois par jour : le matin et l'après-midi. Nous transportons 24 blessés par avion vers les hôpitaux d'Hanoi ou de Saigon. Jusqu'au 13 mars, les évacuations sont classiques. Mais ce jour-là, les deux convoyeuses repartent sous le feu de l'artillerie. La nuit du 19 mars nous faisons une nouvelle tentative : on se pose moteurs coupés, à la barbe des Viéts. Nous chargeons 13 blessés semi-valides et 6 dans des brancards. Je vois les visages boueux, mal rasés. C'est angoissant. Cela ressemble à une descente aux enfers.

Dans la nuit du 27 au 28 mars, nous réussissons encore à nous poser. La visibilité est très mauvaise. Nous chargeons 19 blessés. Mais le mécano nous dit que l'avion a heurté un piquet de barbelé qui a crevé le réservoir d'huile. Impossible de repartir. Les avions attendus les jours suivants ne peuvent pas se poser non plus : la piste est impraticable. Et, le 30 mars, l'artillerie viét se déchaîne. Un bruit infernal. Rapidement tous les espaces libres de l'antenne médicale sont occupés. Les blessés sont dans le couloir. Quand il n'y a plus de places, les brancardiers les laissent à la porte, sur le terre-plein où beaucoup sont tués.

J'ai un sentiment d'horreur et d'impuissance. J'ai envie de m'endormir, de ne pas me réveiller. Je me souviens de ce lieutenant qui va mourir et dont la paralysie gagne les membres ; de ce jeune aveugle ; de ce légionnaire qui m'insulte de douleur en allemand quand je lui nettoie ses plaies... et qui dix ans plus tard me fera parvenir une lettre d'excuses ; de ce jeune gars du Nord qui nous fait rire entre la salle de réa et celle d'opération en nous racontant ses aventures amoureuses ; de la lettre de ma mère qui m'écrit qu'elle est bien contente de me savoir à Dién Bién Phu, ce qui m'évitera un accident d'avion...

Quand j'apprends que les Viéts tiennent la piste et qu'il n'y aura plus d'avions, je ressens... du soulagement. Je n'ai plus envie de quitter ces hommes. Et puis une présence féminine leur remonte le moral, me disent-ils. Les derniers jours sont atroces. On entend à la radio des derniers messages de chefs d'unités : " Les Viéts sont à dix mètres. Embrassez nos familles. Je coupe. "

Par Christophe Courau et Pierre Dufour (Propos recueillis par)

Dossier : Diên Biên Phu

Surtitre : Ils racontent leurs 56 jours en enfer

Je n'avais plus envie de quitter ces hommes

http://www.historia.fr/content/recherche/article?id=5412

01/05/2004 – Historia

Crédit photographique - Geneviève de Galard, infirmière militaire française faite prisonnière à la chute de Dien Bien Phu, arrivant à Paris. Août 1954. LAPI-87613-4

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Geneviève de Galard, une femme dans l’enfer de Dien Bien Phu

http://philippepoisson-hotmail.com.over-blog.com/article-27696929.html

Georges Boudarel, l'instructeur politique du camp 113

http://philippepoisson-hotmail.com.over-blog.com/article-32646018.html

L'affaire Boudarel

Marc Charuel

Editeur : Editions du Rocher (29 août 1991)

http://www.amazon.fr/Laffaire-Boudarel-Marc-Charuel/dp/2268011828

La mort de Georges Boudarel

http://www.investigateur.info/news/articles/article_2003_12_31_mort.html

Georges Boudarel, exemple type de la subversion catholique