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http://multimedia.fnac.com/multimedia/FR/images_produits/FR/Fnac.com/ZoomPE/8/1/2/9782246759218.jpgDocument 2011 - Et si Françoise Giroud était encore plus grande que sa légende ? Plus riche, plus complexe, plus intéressante que l'image d'Épinal de la jeune femme talentueuse qui devint la première journaliste de son temps ?


La trajectoire, on la connaît : engagée par Hélène Lazareff à la création de Elle puis cofondatrice de L'Express, et enfin chroniqueuse au Nouvel Observateur, l'ex script-girl de Jean Renoir avait le sens des phrases assassines : la griffe sous le sourire enjôleur. Compagne et complice de Jean-Jacques Servan-Schreiber, farouche opposante à la guerre d'Algérie, amie fidèle de Mendès France et de Mitterrand, celle qui "inventa" la Nouvelle Vague et roulait en décapotable fut une grande amoureuse, aimant le plaisir autant que le devoir. Femme politique, cette fille d'immigré turcs ne passa jamais son bac, mais devint Secrétaire d'État à la condition féminine sous Giscard d'Estaing. Travailleuse acharnée, élégante en diable, éprise de liberté, c'était une visionnaire, qui incarna la naissance de la femme moderne.


Mais on découvre ici que ce tempérament passionné a aussi ses zones d'ombre - expérience de la trahison, coup de folie passionnelle, tentative de suicide, mort d'un fils... Et si une phrase de sa mère, sur son lit de mort, avait déterminé sa trajectoire et son destin ?


A travers le portrait d'une femme d'exception, c 'est une époque de feu que ressuscite ici Laure Adler : un temps, pas si lointain, où l'on savait encore se battre pour des idéaux.

 

Françoise , Biographie sur Françoise Giroud
Biographie (broché). Paru en 01/2011

 

 

http://mots.extraits.free.fr/francoise_giroud1.jpgAveuglement, erreurs, injustices. Dans Françoise (Grasset), Laure Adler a choisi de dévoiler les aspects les plus sombres de la grande dame de L'Express.

C'est à la manière d'une lame que Françoise Giroud traversa l'histoire de la presse dans la seconde moitié du XXe siècle. Une lame chauffée à blanc dans les combats politiques et éditoriaux, qu'il se soit agi d'engagements partagés avec Jean-Jacques Servan-Schreiber, comme la lutte pour la décolonisation, ou de luttes plus personnelles, tel son féminisme raisonné. Une lame aiguisée chaque matin sur son talent, talent d'écriture mais aussi d'existence. Françoise Giroud sut affronter, séduire, convaincre, corriger tout au long de sa carrière. De la vie parisienne elle flirta avec les légèretés et épousa les révolutions. Dénicheuse de talents, défricheuse d'idées, elle inventa l'une des plus belles définitions du journaliste : "Celui qui lève le voile." A L'Express, nous sommes fidèles à cette Françoise-là.Cette passionnée paya, bien sûr, la rançon de sa différence. De ses douleurs intimes, dont les déchirements amoureux avec JJSS ne furent pas les moindres, à ses errances d'ambition, Françoise Giroud traversa bien des ombres sur son chemin éclatant. L'amour-propre lui fit commettre des erreurs, voire des injustices ; la volonté l'entraîna jusqu'à l'entêtement, voire l'aveuglement. Et elle devint, à L'Express, un mythe, c'est-à-dire, un peu, une prison pour elle-même. Par-delà la scène où brilla la grande dame, Laure Adler s'est attachée à explorer les coulisses parfois glacées d'un destin hors normes. Celui d'une infatigable pionnière. Fragments.


Christophe Barbier 

L'usine à rêves

[1932. Françoise Giroud - elle s'appelle alors France Gourdji, du nom de ses ancêtres, juifs d'Istanbul - a 16 ans à peine lorsqu'elle rencontre son idole, André Gide, grâce au neveu de celui-ci, Dominique Drouin, et à celui qui se prétend tel, Marc Allégret, dont elle sera éperdument amoureuse. L'auteur des Faux-Monnayeurs l'engage comme dactylo avant qu'Allégret ne lui propose de "venir travailler dans ce nouveau métier qu'est le cinéma".]

 
Une autre version, moins romanesque, de l'entrée de Françoise Giroud dans le monde du cinéma m'a été livrée par Alexandra Grinkrug, cousine de son futur mari : Anatole Eliacheff. Françoise aurait été engagée toute jeune par Onessim, père d'Alexandra, et Ossia Loucachevitch, qui dirigeaient une société de production, la Sedif, siégeant 12, rue de Lübeck, adresse de l'ancienne cinémathèque. J'ai pu consulter les carnets d'embauches et les cahiers de commandes : le nom de France Gourdji y apparaît bien au titre des employés. La Sedif était dirigée par ces deux intellectuels juifs originaires de Russie, qui avaient fui la révolution pour fonder à Berlin une société de films. Ayant décidé de quitter l'Allemagne en 1929 pour s'établir en France, ils produisaient les plus grands metteurs en scène, comme en attestent les archives ainsi que le catalogue des films : Remorques, Hôtel du Nord, Veille d'armes, L'Aveu, La Citadelle du silence, L'Epervier. Anatole Eliacheff, dit Tolia, est le cousin germain d'Onessim et travaille dans la société en s'occupant des tournages. France, au début, fait tout : les sandwichs, les comptes, les courses puis, petit à petit, arrive à se faufiler jusque sur les plateaux. Anatole parle six langues, il est beau, cynique, l'ami de Danielle Darrieux, Mireille Balin, Porfirio Rubirosa. Il est déjà une personnalité dans le monde du cinéma, où France n'est rien. Ils vont travailler ensemble pendant plusieurs années en toute amitié, puis se perdront de vue au début de la guerre, avant de se retrouver et de tomber amoureux l'un de l'autre. Pour le moment, il remarque sa capaci té de travail et lui confie de plus en plus de responsabilités, mais c'est Marc Allégret qui va la sortir de sa condition et voir en elle non une bonne à tout faire devenue super-assistante, mais une artiste dans l'âme. Reste à savoir pourquoi elle a toujours cherché à se construire une légende sur ce miracle que fut son accession au monde du cinéma. Désir d'effacer sa future belle famille ou création d'un personnage dont le destin fait rêver ? Toujours est-il que, sans avoir le minimum de connaissances techniques, elle entre comme scripte dans Fanny, de Pagnol. De lui, elle dira qu'il était un ange, toujours en train de s'excuser de sa notoriété et semblant la vivre comme une imposture. Avec Raimu et Fresnay, les rapports sont plus difficiles. Comment, quand on est une puce de 16 ans, avoir de l'autorité sur eux ? "Ils étaient terribles, ces messieurs ; cruels même." Marc Allégret lui viendra en aide en la confiant à son assistant, Pierre Prévert. En deux semaines elle maîtrise la situation, tout en se disant terrorisée par certaines vedettes. Peu importe la peur et l'angoisse : l'important est de changer de monde. Et, jusqu'à la fin de sa vie, elle dira sa dette à l'égard du cinéma, "un monde fou, fou, fou", un monde qui lui aura été donné. [...] Mais le véritable adoubement aura lieu quelques mois plus tard : l'homme qui donnera un sens à son existence, qui reconnaîtra le premier son intelligence et ses dons s'appelle Jean Renoir. Avant cette rencontre, elle était, comme elle le dit joliment, "une personne en projet". Elle ne croyait pas en elle. Elle se sentait salie par ces hommes qui lui réclamaient leur dû sexuel. Lui ne l'a pas jugée physiquement. C'était sa méthode. Des candidates actrices qui se présentaient pomponnées, il faisait dire à son régisseur : "Qu'elles reviennent quand elles auront la vérole." Il considérait qu'il était inutile de crier sur un plateau et avait le don de trouver le plus profond en chaque être. "On se serait fait tuer pour lui donner satisfaction." A Françoise, il a dit d'aller au plus profond d'elle-même, quitte à se gâcher l'existence : "Ce que j'ai reçu de Renoir, c'est la révélation de mes virtualités." Elle l'appelait Monsieur. "En fait, c'est le premier homme que j'aie respecté." 

L'insolence de L'Express

[Après la guerre, Françoise Giroud fait ses premiers pas de journaliste à Elle, l'hebdomadaire féminin dirigé par Hélène Gordon, l'épouse de Pierre Lazareff, le patron de France-Soir. En 1952, elle rencontre dans un cocktail Jean-Jacques Servan-Schreiber, de neuf ans son cadet. C'est le coup de foudre. Lui rêve d'un journal, elle "va mettre en forme ses idées", selon Laure Adler. Le premier numéro de L'Express, sous-titré Les Echos du samedi, sort le 16 mai 1953. L'Express devient l'organe de défense du mendésisme. Il dénonce les errements du parlementarisme et les dégâts de la politique indochinoise. Françoise Giroud fait tourner la machine.]

Françoise Giroud, au fil du temps, s'impose comme la patronne, notamment auprès des hommes. C'est elle qui dirige et elle entend le faire savoir, en particulier à Jean Cau, Philippe Grumbach et Jean Daniel. Celui-ci se souvient : "La première fois que je l'ai vue, je l'ai trouvée très belle et impressionnante. Elle était avec Jean-Jacques. Cela se voyait qu'ils étaient ensemble, alors qu'aucun signe extérieur ne le manifestait. Mes premiers articles avaient été corrigés par JJSS, qui aimait le style américain direct, factuel. Il m'a enlevé des "de nos jours", "on ne sait pas", "encore que"... Elle aussi voulait de l'affirmatif, du concret, voire du péremptoire, en tout cas de l'incisif, où elle excellait elle-même en utilisant très peu d'adjectifs. Camus m'a dit un jour : "Ce que recherche Françoise, c'est mêler la concision à la trouvaille." Françoise voulait avoir la main sur tout le journal et cela n'allait pas sans engueulades, notamment avec Brigitte Gros, l'une des deux soeurs de Jean-Jacques. Elle avait un côté snob : elle avait adopté Florence et était tout éblouie de la gentillesse de la fille de Malraux, qu'elle se vantait de faire travailler. Elle témoignait quelquefois d'une dureté et d'une méchanceté que je lui reprochais. Pour elle, la vie était un combat, une sélection d'espèces. Elle ne respectait que les gens qui s'affirmaient et elle savait qu'ils étaient des tueurs. Elle sortait ses griffes à tout moment et n'entendait pas ne pas être la première au courant de tout événement. Quand Grumbach lui apportait une information, elle se sentait blessée. Elle détestait ceux qui la quittaient et n'éprouvait guère de pitié. Jean Cau, qui avait les plus grands défauts, mais aussi les plus grandes qualités, a voulu partir pour écrire une pièce. Françoise lui a fait un pot de départ avec moult compliments. Deux ans plus tard, elle est conviée à la première de la pièce. En allant au marbre le surlendemain, je lis une critique d'une violence inouïe sur le spectacle. Les articles étaient toujours anonymes à l'époque. Je questionne Françoise, qui me dit qu'elle en est l'auteur. Je lui rappelle qu'il a beaucoup fait pour le journal, qu'il a été des nôtres. Elle me répond : "La pièce n'est pas bonne et il nous a quittés. Vous voulez que je mette mes initiales ?" Elle l'a fait. Un soir, elle donne un dîner avenue Raphaël : Mendès, Mauriac et, bien sûr, Jean-Jacques sont là. A la fin du dîner, Mauriac voit, sur la cheminée, des extenseurs. Mauriac s'approche de JJSS et, de sa voix blessée, lui dit : "Vous aimez cette femme ? A votre place, j'aurais une sacrée frousse..."", conclut, en souriant, Jean Daniel. A l'époque, Françoise et Jean-Jacques sont fous amoureux.


Caroline se souvient être entrée, par effraction, dans la chambre de sa mère, un dimanche après-midi et, gênée, y avoir vu sa mère sursauter alors qu'elle remettait ses bas. Jean-Jacques lui offre chaque jour des roses ; dans les grandes occasions, des rosiers. Il lui adresse des mots d'amour chaque soir quand chacun rentre chez soi. 

[...] "Françoise, vous êtes le courage et, en dehors même du fait que je vous aime, c'est ce qui me touche au plus profond." Jean-Jacques l'aime et l'admire. Françoise n'est pas seulement sa muse, son amoureuse. Elle est aussi l'unique personne à qui il peut tout dire, y compris ses volte-face sur des sujets essentiels comme le mendésisme. Dans une lettre non datée, mais envoyée de Megève, manifestement au tout début de 1955, il lui avoue : "Il n'y a plus que des illusions et des hypocrisies dans la politique mendésiste. Il faut sortir complètement de l'univers, du vocabulaire, des termes de référence de notre combat politique de ces dernières années. Il y a une "mue" radicale à effectuer. C'est cela que les gens qui nous ont fait confiance attendent de nous. Je suis impatient de connaître vos sentiments. Avez-vous encore les forces pour nous renouveler complètement ? Et encore le crédit de l'audience ? Je ne sais. C'est notre prochaine étape. A bientôt, mon amour."
(Imec, correspondance inédite.)  

Laure Adler dévoile la vraie Françoise Giroud

Par L'Express Livres, publié le 13/01/2011 à 12:00

http://www.lexpress.fr/culture/livre/laure-adler-devoile-la-vraie-francoise-giroud_952090.html

 

 

 

http://static.ulike.net/img/02_Laure_Adler.jpgLaure Adler. Parce qu’elle sort un ouvrage passionnant sur Françoise Giroud. Après sept ans d’enquête, Laure Adler nous livre dans « Françoise » un portrait inédit de celle qui fut la première rédactrice en chef de ELLE et la cofondatrice de « L’Express ». Si Laure Adler a connu Françoise Giroud, elle a surtout eu la possibilité d’accéder aux archives de Caroline Eliacheff, la fille de Françoise. Son livre nous fait découvrir celle qui se cachait derrière le bourreau de travail. Une femme passionnée et ébranlée après sa rupture avec Jean Jacques Servan-Schreiber et la mort de son fils. Qui était celle qui avait juré à sa mère de ne jamais révéler leurs origines juives et qui, après qu’elle ait été quittée, envoyait des lettres antisémites à la famille Servan-Schreiber ?

http://www.elle.fr/elle/Societe/Les-femmes-de-la-semaine/Les-femmes-de-la-semaine-les-Tunisiennes-se-sont-battues-pour-la-liberte/Laure-Adler

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