Document 2010 - Les policiers affectés à la sécurité des hommes d'État sont entrés dans le XXIe siècle le 11 septembre 2001.
Aux attentats traditionnels réalisés par des individus isolés s'ajoutent désormais les agressions de kamikazes à l'explosif lourd. Voitures blindées, armes de guerre, avec quels moyens les gardes du corps du Service de protection des hautes personnalités de la police française se sont-ils adaptés à cette nouvelle menace ? Ces policiers d'élite doivent aussi protéger de plus en plus l'image de leurs VIP face à des paparazzis omniprésents, des opposants virulents, voire des " entarteurs " rusés.
Vie publique, vie privée, comment travaillent-ils 24 heures sur 24 dans l'intimité d'une personnalité particulièrement exposée? L'entraînement intensif aux techniques de tir et de combat ne suffit plus à faire d'eux de bons officiers de sécurité. Ils doivent aussi savoir jouer les aides de camp, faire preuve de psychologie face aux humeurs parfois capricieuses de leurs protégés et même s'intégrer dans leur famille en évitant toute familiarité.
De la protection du pape Jean-Paul II à celle de Nicolas Sarkozy ou encore de Yasser Arafat, un témoignage captivant, bourré d'anecdotes qui alternent action et émotion au cœur du métier très sensible de garde du corps de la République.
Jean-Pierre Diot , Laurent Huberson
Broché
Paru le : 10/11/2010
Éditeur : Cherche-Midi (Le)
Collection : Documents
L'auteur en quelques mots en 2010 ...
Jean-Pierre Diot est maintenant brigadier-major dans la réserve opérationnelle de la police nationale au Service de protection des hautes personnalités et consultant/formateur en matière de protection rapprochée pour des institutions internationales et des entreprises privées.
Archive de presse 2007 - Nicolas Sarkozy chamboule - aussi - le groupe chargé de protéger le chef de l'État. Au repos, les policiers et les gendarmes de l'ère Chirac. Place à une centaine de superflics dotés de moyens considérablement renforcés.
C'est une révolution de palais. A peine arrivé à l'Élysée, Nicolas Sarkozy bouscule l'institution et le protocole. Sur le plan de la sécurité aussi, il tourne la page Chirac. Ou plutôt il la déchire. Dès le 6 mai, alors que le chef de l'État vient de voter, les portables de ses gardes du corps sonnent : la plupart de ces policiers comprennent qu'ils sont débarqués avant même l'annonce des résultats ! Depuis plusieurs mois, l'équipe de Sarkozy est prête à prendre la relève. Si ce n'est pas un putsch, cela y ressemble.
De profundis... Le Groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR) est moribond, du moins dans sa configuration actuelle : 30 policiers et 30 gendarmes, dont un lieutenant-colonel, chef de l'unité. Ces derniers, à leur tour, apprennent leur éviction le 15 mai, veille de l'investiture de Nicolas Sarkozy. Ils sont aujourd'hui placardisés dans l'aile droite du palais, interdits de mission. L'arme au pied et la larme à l'œil : la nouvelle suscite l'incompréhension de la base au sommet de la gendarmerie, apparemment victime d'avoir trop bien gardé un secret d'État.
Sarkozy ne pardonne pas cette fidélité toute militaire aux consignes de confidentialité absolue données par Jacques Chirac, lors de son hospitalisation au Val-de-Grâce, le 2 septembre 2005, pour un accident vasculaire cérébral. Ce soir-là, vers 19 heures, seuls un lieutenant de gendarmerie, un médecin et un chauffeur accompagnent le président à l'hôpital. Rien ne doit filtrer, ni à Matignon, ni à la Défense, ni surtout Place Beauvau : Chirac vient de perdre tout espoir d'une candidature à un troisième mandat. Le ministre de l'Intérieur n'apprendra la nouvelle que le lendemain, lors de l'université d'été des jeunes de l'UMP, à La Baule (Loire-Atlantique). Un ‹ faux pas › évité de justesse, en 1992, par l'officier de sécurité de François Mitterrand : il avait informé son directeur de l'époque, Georges Querry, que le président allait être opéré de la prostate le jour suivant.
L'homme qui va diriger la garde rapprochée de Sarkozy à l'Élysée est un flic de choc, Michel Besnard. Des secrets, il sait en garder, lui aussi, notamment quand le ‹ patron › traverse des tempêtes médiatiques et conjugales. Ce commandant de police, que Sarkozy tutoie, suit l'homme depuis son premier passage à l'Intérieur, en 2002. Malgré lui, le policier fut le témoin privilégié des vicissitudes du couple Sarkozy, sans pour autant en rendre compte à sa hiérarchie. Il a aussi facilité les retrouvailles familiales en supervisant, à partir de Paris, le voyage improvisé du couple à Malte, du 7 au 10 mai. Professionnel reconnu - il fit preuve de sang-froid lors des incidents sur la dalle d'Argenteuil (Val-d'Oise) - arrangeant avec les journalistes, mais avare de confidences, Besnard n'a rien d'un militant droitier. Il fut longtemps adhérent du Syndicat national des officiers de police (Snop), héritier de la galaxie policière de gauche. Et protégea, à Matignon, Lionel Jospin.
Méritocratie ou clanisme ?
A force de suivre Nicolas Sarkozy comme son ombre, il a intégré son appétence pour l'image. Les photographes se souviennent de son habileté à retenir hors du champ des objectifs François Fillon et Philippe Douste-Blazy, qui ne quittaient pas Sarkozy d'une semelle lors de son premier déplacement de candidat au Mont-Saint-Michel, le 15 janvier 2007. Résultat : une photo esthétiquement parfaite de Sarkozy, seul face au grand large...
Pour occuper sa fonction, le futur patron du GSPR doit monter en grade. On parle d'une promotion fulgurante, au rang de préfet. Méritocratie ou clanisme ? La nouvelle équipe a en tout cas obtenu le doublement de la prime des gardes du corps affectés au président. Selon des sources concordantes, elle vient de passer à 1 500 euros par mois. Les policiers de l'ère Chirac, réaffectés dans leur service d'origine - le SPHP - à la protection de personnalités moins prestigieuses, ont d'autant plus de mal à digérer leur relégation. Très peu y ont échappé. Six fonctionnaires seulement sont restés, dont celui qui est affecté depuis des lustres aux relations avec les riverains de l'Élysée, un poste sensible dans ce quartier huppé.
Chirac avait dégraissé les effectifs de moitié
Le style a changé, les moyens aussi : 83 policiers ont été recrutés. Une vingtaine devraient suivre. Sarkozy crée une protection à la mesure de sa toute-puissance politique, de son exposition médiatique et des incidents qu'a suscités son élection. Il y prit goût à l'Intérieur. Déjà, le choix, comme voiture suiveuse, d'un luxueux 4 x 4 Volkswagen Touareg blindé avait attiré l'attention. Et le montant de la facture avait fait grincer les dents des comptables de la Direction générale de la police.
Une ligne contraire à celle adoptée par Chirac, à son arrivée en 1995, qui avait dégraissé les effectifs de moitié. L'ancien chef de l'État, et plus encore sa fille Claude, incitaient lesbody guards à se tenir à distance pour préserver l'image d'un président proche des gens. Ce qui n'empêche pas la convivialité. Avant son départ, le 25 avril, il les réunissait une dernière fois, avec leur famille, autour d'un grand buffet dans les jardins de l'Élysée. Dans sa retraite du quai Voltaire, il a conservé à ses côtés huit policiers et gendarmes. Même si Bernadette n'a, semble-t-il, pas souhaité reprendre à son service l'homme de confiance de son époux, Joël, qui connaissait trop bien ses toquades.
Les gendarmes de François Mitterrand savaient tout de ses incartades et de sa double vie. Ce sont les policiers qui, en 1988, la révélèrent à Charles Pasqua, alors ministre de l'Intérieur. Il fallait d'urgence prévenir le président de la libération des otages français du Liban. Penauds, ils ont dû avouer que le chef de l'État ne se trouvait pas à l'Élysée, mais chez une dame, une certaine Anne Pingeot, quai Branly. ‹ Mais qu'est-ce qu'il fout là ? › s'est exclamé Pasqua.
Enfermés au Château et corsetés par une sécurité omniprésente, les prédécesseurs de Nicolas Sarkozy ressentaient le besoin de se ménager quelques plages de liberté, grâce à la complicité de leurs ‹ privés ›, les plus proches de leurs officiers de sécurité. Un petit tunnel rejoignant un parking souterrain des environs reste le moyen le plus sûr de s'éclipser. Sans se faire remarquer des gardes républicains veillant nuit et jour sur l'Élysée.
Par Éric Pelletier, Jean-Marie Pontaut et Romain Rosso, publié le 06/06/2007 - mis à jour le 10/07/2007 20:07
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