La commémoration du quadricentenaire de la mort d’Henri IV a été marquée par un coup de théâtre final : la découverte de la tête d’Henri IV ! S’agit-il pour autant du « vrai » crâne du premier des Bourbons, comme l’affirment, « à 99,99 % », les scientifiques ? Enquête.
La cause paraissait entendue :
le crâne, récemment redécouvert par le journaliste Stéphane Gabet chez un retraité de 84 ans, monsieur Jacques Bellanger[1], a été authentifié comme étant celui d’Henri IV, avec une probabilité supérieure « à 99,99 % ».
Voilà ce qu’expliqua, le 16 décembre 2010, sur l’estrade de l’auditorium du Grand Palais, à Paris, l’équipe internationale de dix-neuf scientifiques dirigée par le docteur Philippe Charlier. Ce
dernier, surnommé « l’Indiana Jones des cimetières », s’est déjà distingué pour avoir mené une étonnante étude scientifique sur les restes d’Agnès Sorel (1422-1450), qui permit de
prouver, notamment à partir d’échantillons de cheveux révélant une très importante concentration de mercure (près de 7,5 % de la valeur massique), que la maîtresse du roi Charles VII était
morte, brutalement, d’un empoisonnement massif (cent mille fois la dose thérapeutique !)[2].
Pour le crâne d’Henri IV, les preuves paraissent multiples et convergentes : la tête brunie, où l’on distingue la trace d’une barbe et d’une moustache aux poils roux et blancs mêlés,
semble bien celle du Vert Galant, dont le cadavre avait été exhumé et aurait été décapité à Saint-Denis par les révolutionnaires, en octobre 1793. Et puis, tout paraît concorder, notamment les
caractéristiques connues du visage du premier des Bourbons, qui avait une tache sombre sur le nez (seul un buste permet de l’attester) et portait une boucle d’oreille à l’oreille droite (seule
une gravure montre une boucle à l’oreille du roi). Son visage était aussi marqué par une cicatrice aux lèvres datant d’une tentative d’assassinat de Jean Châtel en décembre 1594 (nous savons,
en effet, que le roi fut touché à la lèvre supérieure et perdit une dent). Plus encore, la superposition faciale montrerait que le crâne correspond parfaitement au moulage réalisé juste après
la mort du roi, moulage conservé à la bibliothèque Sainte-Geneviève, à Paris, qui porte, lui aussi, un grand front, un gros nez et un menton carré. Enfin, la datation au carbone 14 prouve que
l’individu est décédé dans une période comprise entre 1450 et 1650.
Pourtant, malgré ce faisceau d’indices troublants, dès le 5 janvier 2011, dans un article de L’Express (« Henri IV, sa tête à couper ? »), Philippe Delorme, journaliste et historien, émettait des doutes sur l’authenticité du crâne, s’étonnant, notamment, de
l’absence de résultats ADN, c’est-à-dire de signature génétique (les généticiens n’auraient pu analyser les génomes, trop segmentés, trop pollués pour être exploités), et du manque de clarté de
l’enquête historique qui aurait dû, parallèlement, être menée pour confirmer les analyses scientifiques.
Il est vrai en effet que, dans cette affaire, dès qu’on aborde le dossier documentaire et archivistique en notre possession, la certitude ne semble plus aussi totalement assurée…
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L'étrange affaire du crâne d'Henri IV
Par Joël Cornette