Document 2006 - Publiciste et
philanthrope français, Théophraste Renaudot (1586-1653) est un personnage hors du commun. Médecin de Louis
XIII et ami de Richelieu, il est à l'origine d'institutions qui ont survécu jusqu'à aujourd'hui : les monts-de-piété, les petites annonces, l'assistance publique, l'agence pour l'emploi et bien
entendu la presse.
Non seulement il fut un médecin exceptionnel, un chercheur, mais aussi un inventeur des mesures sociales dont
s'enorgueillit à tort le XXe siècle car c'est Renaudot qui, dans son désir de soulager le désarroi des pauvres, a inventé la solidarité, le mutualisme. Il soignait gratis.
Pierre Roudy rend justice à l'œuvre d'un personnage injustement oublié. Les livres d'histoire n'en disent rien.
Pierre
Roudy, romancier, dramaturge, essayiste, a enseigné au Lycée Louis le Grand, à l'Ecole de journalisme, et a dirigé pendant vingt ans l'école de théâtre de la rue
Blanche. Il a notamment publié des romans : L'Espoir au clou (Julliard), La Florisane (Flammarion) ;
des traductions Casanova restaurant chinois, de A. Powell (Julliard), La Princesse du Portugal, de Tibor Déry (Albin Michel). Il a dirigé une
collection chez Magnard de pièces de théâtre pour la jeunesse, et a publié de nombreuses pièces pour enfants.
Début du livre : «Le
tocsin de Saint-Germain l'Auxerrois retentissait encore avec violence, ce matin-là. Les sonneurs s'étaient relayés toute la nuit et trouvaient encore la force de tirer sur les cordes. Le sang
coulait dans les rues. On avait égorgé, tout au long de ces tristes heures, de prétendus vauriens, des suppôts de Satan, des infidèles, bref, des huguenots, des calvinistes. Le peuple qui ne
savait point ce qu'on leur reprochait avait pris le parti de la colère, de la déraison. On pouvait tuer, donc on tuait. Il faut toujours à la foule un exutoire ; une explication n'est pas
nécessaire. On tuait non pas son prochain mais la misère ; on tentait de se persuader que ceux qu'on assassinait étaient responsables de la cherté du pain et du travail harassant. On se vengeait
des corporations qui refusaient du travail à ceux qui venaient des campagnes, errant sans but dans les rues de Paris à la recherche d'une bonne âme à apitoyer ou d'un passant à
détrousser.
On tuait surtout à l'arme blanche : elle fait saigner beaucoup ; le sang tache, le sang se répand, le sang se voit de loin,
le sang enivre. Pour se donner du coeur pendant la nuit, certains parmi les meurtriers enfonçaient leur chapeau sur leur tête. De cette façon, pensaient-ils, on ne les reconnaîtrait point. Ce
qu'ils ne savaient pas, c'est que leur conscience les reconnaîtrait toujours. On a dit que, vingt ou trente ans plus tard, ces criminels divaguaient dans leur sommeil.
Catherine de Médicis avait réussi à arracher à son fils, Charles IX, son consentement au massacre. Il avait hésité. II
comprenait les raisons de cette exaspération de la Reine. Il est vrai que le parti protestant avait trouvé des gages dans la paix de Saint-Germain et que la Reine en avait été mortifiée. Et cela
d'autant plus que cette paix avait signifié un retournement de la politique de l'État, la France s'alliant aux États touchés par la Réforme, à savoir les Pays-Bas et l'Angleterre.
Depuis ses appartements, Catherine n'a pas pu ne pas entendre les cloches. Elle a entendu les cris. Au début, elle n'y
avait pas pris garde, puis le sommeil ne venant pas, les cris retentissant toujours, elle avait tenté, dit-on, de se boucher les oreilles...»
Auteur : Pierre Roudy
Genre : Biographies, mémoires, correspondances...
Éditeur : le Bord de l'eau, Latresne, France
Collection : Biographies
Acheter Théophraste Renaudot : journaliste & médecin du peuplechez ces
libraires indépendants en ligne :
L'Alinéa (Martigues) Dialogues (Brest) Durance (Nantes) Maison du livre (Rodez) Mollat (Bordeaux) Ombres Blanches (Toulouse) Sauramps (Montpellier) Thuard (Le Mans)