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Nouveau portrait du jour : Robert-Michel Degrima

Culture et justice développe la rubrique Portrait du jour, ouvre ses pages aux fidèles lecteurs de la page et reçoit avec infiniment de plaisir Robert-Michel Degrima.

Robert-Michel Degrima est un officier de gendarmerie, aujourd’hui en retraite, qui a aussi été, dans sa voie professionnelle, directeur de sociétés et directeur de cabinet. Il écrit depuis plusieurs années des nouvelles, un roman est déjà publié, un autre devrait suivre bientôt et un recueil de nouvelles est sous presse.

Pour vous amuser, vous pouvez, sur sa page Facebook, répondre au questionnaire sur « Mademoiselle de Montclert ou les vertus du libertinage » et gagner, peut-être, un autre livre qui paraîtra bientôt.

https://www.facebook.com/robertmichel.degrima.9

*

L’INTERVIEW IMAGINAIRE

 

Q : Robert-Michel Degrima, les éditions Presses Littéraires ont publié votre roman « Mademoiselle de Montclert ou les vertus du libertinage ». C’est votre premier ouvrage. Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire ?

R : « Mademoiselle de Montclert » est effectivement mon premier roman, mais ce n’est pas ma première œuvre littéraire. J’ai déjà écrit de nombreuses nouvelles, par jeu, puis amuser mes amis, qui m’ont incité à persévérer. Quelques-unes seront publiées dans un recueil très bientôt. Ce roman a été écrit sous la – mauvaise – influence d’un ami qui, lisant mes nouvelles, me poussa à la rédaction d’un roman. Ma première motivation est toujours la même, que ce soit pour les nouvelles ou pour le roman : écrire une histoire qui m’amuse et qui, je l’espère, amusera les lecteurs.

Q : Vous êtes en retraite ; vous avez donc un âge certain. Vous n’êtes donc pas un auteur jeune, même si vous êtes un jeune auteur. Pourquoi avoir attendu si tard pour écrire ?

R : J’ai eu la chance, dans ma vie, de faire des métiers passionnants auxquels je me suis consacré entièrement. Ayant aussi une famille et ne voulant pas totalement la délaisser, voulant aussi pratiquer quelques activités sportives et culturelles, le temps restant était bien mince… Il faut bien dormir de temps en temps ! La retraite m’a libéré des contraintes professionnelles et j’ai eu, comme disent les marins, de l’eau à courir. Et puis, dans les milieux professionnels où j’exerçais, à une certaine époque, mes textes auraient peut-être choqué. Il m’aurait fallu user d’un pseudonyme, ce que je ne voulais pas.

Q : Comment est né ce livre ? Y en aura-t-il d’autres ?

R : En fait, ce roman a commencé par être une nouvelle qui, au fil de mes insomnies est devenue un roman, une idée, une scène, une situation entraînant l’autre. Des personnages nouveaux sont apparus, l’histoire s’est compliquée. Il m’a fallu environ un an pour l’écrire, puis les premiers lecteurs, des amis impitoyables, m’ont lu, relu, et fait des remarques… Un vrai supplice ! Il m’a donc fallu presque un an et demi, mais en prenant mon temps. Il y aura d’autres romans ; le deuxième est déjà en relecture ! Encore quelques insomnies et l’écriture du troisième pourra débuter.

Q : Dans quel genre classeriez-vous votre roman ?

R : Je n’ai pas voulu m’enfermer dans un seul genre. C’est un peu un roman historique, pas une œuvre d’historien, un peu roman psychologique, mais je ne concurrence pas les psychologues, un peu roman d’aventure aussi, roman d’amour par certains côtés, avec quelques passages érotico-comiques. De la tendresse, parfois, pour certains personnages. J’ai surtout voulu écrire une histoire drôle, émouvante, comique, triste, tout cela à la fois, comme la vie. On y trouve trace de mes amours : la mer et les bateaux, les îles, le soleil, les femmes et la bonne chère, les copains et les amitiés fidèles…

Q : Quel lien entre votre vie, votre expérience professionnelle et vos personnages ?

R : Les personnages sont un amalgame d’hommes et de femmes que j’ai rencontrés dans mon métier, dans ma vie privée – non, je ne dirai pas lesquels, je tiens à conserver mes amis et mes ennemis – j’ai emprunté des traits de caractère, des attitudes, des travers, des qualités à de multiples personnes. Mais un personnage doit garder une cohérence interne, même si même les plus méprisables ont quelque chose de bon ; il faut donc le bâtir avec attention. Je ne sais plus dans quel roman Victor Hugo a décrit un homme : « qui se jetterait à l’eau pour vous sauver et vous y remettrait pour cinq francs ». Vous imaginez bien que dans ma vie j’ai côtoyé les meilleurs et les pires des hommes. C’est pourquoi j’ai fait dire à un personnage, dans une de mes nouvelles, que « le meilleur d’entre nous est capable du pire ». J’ai rencontré des ministres qui étaient des voyous et des voyous qui auraient pu être ministres… Mais c’était il y a longtemps.

Q : Vous seriez donc un pessimiste ?

: Je suis de ces pessimistes qui n’ont qu’une alternative : le suicide ou l’optimisme. J’ai choisi l’optimisme.

Q : Avez-vous « ciblé » un lectorat particulier ?

R : je n’ai pas visé un lectorat précis, je crois que dans l’écriture, tout ne doit pas procéder du calcul, sauf à donner des produits stéréotypés et insipides. J’écris surtout pour le plaisir de raconter une histoire avec des rebondissements, des péripéties, avec beaucoup de spontanéité.

Q : Une dernière question. Quelle est la place des livres dans votre vie, quels écrivains vous inspirent ?

R : Ma petite bibliothèque doit contenir un bon millier de titres et les écrivains qui m’inspirent sont inimitables. Je n’imite donc personne, même si toutes mes lectures m’ont influencé, et cela depuis le premier bouquin ouvert (cette chère comtesse de Ségur, j’avais six ans). Je relis en ce moment Romain Gary, qui fut précédé sur ma table de nuit par Homère et Yourcenar ; j’aime bien de temps en temps replonger dans un roman de Jacques Perret ou de Blondin… Daniel Pennac, Proust, Camus, Zweig, Maupassant, mes lectures sont très éclectiques, hétéroclites diront certains… Une chose est certaine : je ne peux pas me passer de lire.

Q : On termine sur une phrase de votre roman ?

R : La dernière : « Et désormais, la vie s’écoula, lente et douce au domaine de Bergen comme à celui du Royal Grand Morne, dont le roi n’entendit plus jamais parler… ». Fin. Mais, je vous livre quelques extraits...

QUELQUES EXTRAITS POUR MISE EN BOUCHE

LA MARIANNE

Au port de Nantes, très loin du château de Montclert, la Marianne, brick négrier de 150 tonneaux, quatre-vingts pieds de long et 25 de bau, calant dix pieds, servi par une quarantaine de marins, aux ordres d'Antoine de Lombelle, capitaine expérimenté, finissait ces jours-ci d’être armée pour un voyage inhabituel : au lieu du traditionnel itinéraire du commerce triangulaire Nantes – Côtes de l'Afrique – Antilles et retour à Nantes, il allait partir en droiture sur les Antilles, avec un chargement, non de bois d'ébène, mais, cette fois-ci, de bois blanc. Il prenait en charge des femmes destinées au mariage et au peuplement des îles.

Parmi elles, une centaine de condamnées que le roi gracierait si elles partaient se faire oublier loin de France. Prostituées, voleuses, meurtrières, souvent les deux ou les trois à la fois, elles mesuraient leur chance et surtout entrevoyaient la possibilité de se caser auprès d'un petit planteur peu regardant sur le passé de sa femme, même si nombre d'entre elles savaient d'avance qu'elles recommenceraient à se vendre dans les cabarets des îles aux marins, pirates, voleurs et ivrognes de tout poil. Un autre contingent, plus modeste en nombre, était constitué de filles pionnières volontaires qui fuyaient leur famille, leur radieux avenir de femme de marin ou de paysan breton, esclavage peu différent de celui des putains, esclaves d'un seul homme qui les battrait, les violerait et les exploiterait à sa manière, pas forcément plus douce que celle d'un cabaretier.

…………………………

L’EMBARQUEMENT DES DEMOISELLES

…… Le marin s’écarta, et, curieux de la suite, regarda Jeanne, furieuse, s’élancer, trébucher et tomber à quatre pattes sur le bois rugueux de la passerelle tandis que le vent, se prenant dans ses jupons lui retournait par-dessus la tête jupes et robe, dévoilant à tous deux belles fesses roses, rondes et charnues..[…] Les mieux placés des spectateurs eurent même la vision fugitive des lèvres de la trousse comme le dira ce bon Musset, vision dont certains ne dormirent pas de trois nuits. Le temps que Jeanne reprenne ses esprits et rabatte ses vêtements, tous les témoins avaient éclaté de rire, Françoise comprise, et l’une des filles, embarquée volontaire, plantureuse bourguignonne dotée de lourds appâts, hilare, l’apostropha en roulant les « r » :

« La bell’ d’moiselle voudrrait p’t’ête fairre cadeau d’son cul au cap’taine et el’ lui montrre sa marrchandise ! Mais e’ n’ sait point’encorre que susse bateau, ce purritain là a interrdit à tout le monde d’mettrr’ le grrrand Turrrc dans Constantinople ! ».

Cet extrait a été illustré par Jean-Pierre Loeffler, artiste peintre ami de l’auteur qui reproduit ici le tableau « La Passerelle » avec l’autorisation de l’artiste.

 

 

JACQUES-FRANÇOIS DE VARIN – LE MARIN

Varin mit en place ses hommes et envoya une estafette au sommet du morne derrière ses troupes qui, visible de la vigie de l'Agile, donna le signal au navire de mettre à la voile et d'exécuter la manœuvre prévue. Suivant les ordres, la frégate royale coupa le pirate de l’île, lui interdisant ainsi d'appuyer de ses feux ses hommes à terre comme à ceux-ci de rejoindre leur bord. Le second lieutenant devait si possible prendre intact le flibustier, et à défaut, le couler sans pitié. En quelques minutes le coup fut joué : au sol, Varin fit ouvrir un feu de salve meurtrier sur les pirates à peine éveillés pendant que les canons du pont supérieur de l'Agile, chargés à mitraille, nettoyaient le pont du bateau des pirates. L'assaut au sol, baïonnette au canon, tua ceux qui avaient échappé aux balles et qui ne manifestèrent pas avec assez de célérité et de clarté leur volonté de se rendre. Tous furent donc tués, blessés ou pris, ceux du navire n'eurent pas le temps de comprendre leur infortune quand, après la mitraille, les soldats de marine se ruèrent sur leur pont.

Le grand soleil vit les bandits blessés et irrécupérables pendus, les morts jetés aux requins, et les survivants, assez nombreux en définitive, enchaînés à fond de cale…..

…………………………………………………….

JACQUES-FRANÇOIS DE VARIN – LE COURTISAN

. Jacques-François, invité du roi, fut l’invité de tout ce qui comptait ; il fut de toutes les représentations au théâtre, il entendit chez le prince de Condé l’étoile montante de l’opéra, Anne-Victoire de Dervieux, qui commençait aussi une carrière de courtisane ; on disait d’ailleurs qu’elle y avait plus de talent qu’à la scène ; elle le pria à dîner et lui fit une place dans son lit entre le prince de Conti, le comte d’Artois et le comte de Provence. Il eut sur ces princes du sang l’immense avantage et la satisfaction de vanité de jouir des charmes d’une dame que les autres entretenaient. Ils le surent, ne s’en offusquèrent pas, grands seigneurs qu’ils étaient, et comprirent que la demoiselle ne pouvait rester en dehors de la mode. Et Jacques-François était la mode du jour. Le prince de Conti demanda même en manière de plaisanterie à Jacques-François s’il en était satisfait et rit beaucoup de la réponse de Varin qui lui dit qu’un aussi grand homme que le prince avait le meilleur goût, donc ne pouvait avoir que le meilleur de ce que le royaume offrait, et que le simple marin qu’il était aurait mauvaise grâce à critiquer ce qu’un prince du sang appréciait ! Le comte d’Artois s’inquiétant lui aussi du bonheur de Jacques-François, celui-ci lui précisa qu’un simple chevalier ne pouvait qu’être heureux et honoré d’entrer dans la famille d’un grand du royaume, fut-ce par la poterne… Déjà réputé bon sabreur, on le dit désormais homme d’esprit puisque le roi avait applaudi ses saillies.


 

Tag(s) : #Coup de coeur du jour, #portrait du jour criminocorpus
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