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Hommage aux policiers suicidés, Montpellier, 19/04/2019 ©Maxppp

- PHOTOPQR/LE MIDI LIBRE/MAXPPP

 

Comment améliorer les conditions de travail et prévenir le stress post-traumatique des policiers ?

 

Avec

 

  • Christophe Girard Enquêteur de la Police judiciaire à Dijon

  • Rachid Azizi Commandant divisionnaire de police

  •  

Si le « syndrome vicariant » affecte tous les professionnels confrontés à l’horreur – comme les magistrats, les pompiers, les journalistes - le métier de policier est particulièrement exposé. Pas seulement ceux qui font des enquêtes mais aussi, peut-être surtout, les policiers du quotidien, les primo-intervenants sur des événements auxquels ils doivent réagir en ayant clairement à l’esprit qu’aucune de leurs actions n’est anodine : tout peut arriver, tout peut déraper, tout peut basculer. A propos de l'hypervigilance du métier, Rachid Azizi ajoute "les gens sourient lorsqu'ils me voient rentrer dans une pièce parce qu'ils me voient observer et scanner cette pièce, de sorte à pouvoir envisager une éventuelle sortie, c'est un réflexe qu'on développe. Etre de la police c'est comme une seconde peau, comme quelque chose qui fait partie de votre écosystème dans lequel vous évoluez. On ne ressent pas forcément du stress ou de la violence, cela fait partie de notre environnement.  Après des décennies d'activité, c'est une seconde peau avec laquelle on peut vivre, mais il faut savoir aussi la déposer à un moment donné, sinon vous devenez prisonnier".

 

Les policiers vivent des situations extrêmement dangereuses : ils sont en prise directe avec les passions humaines dans une proximité constante avec la violence et la mort. Comment gérer leurs émotions et notamment la peur ; à qui peuvent-ils s’en ouvrir ? Et surtout, la culture professionnelle de l’institution les autorise-t-elle à les exprimer ? Christophe Girard nous explique que "encore aujourd'hui exprimer la peur et la tristesse ce sont des gros mots dans notre institution. Il ne faut pas en parler, et faire comme si on n'avait pas peur. Alors, on encaisse dans la solitude parce qu'en fait, on ne partage pas cela avec nos collègues. C'est très compliqué de partager ses émotions, même avec ses collègues et avec ses proches et cela finit par créer un décalage émotionnel. Seulement, quand on connaît la fonction utile de la peur, c'est plutôt sain d'avoir peur. cela permet d'identifier le danger, de préparer notre corps à intervenir comme il faut et de faire le job et c'est à ce moment-là qu'on fait preuve de courage. Mais cela ne s'apprend pas dans les écoles de police et c'est bien dommage".

Rappelons que le taux de suicide chez les policiers est deux fois supérieur à celui de la population générale. D’où la nécessité de se pencher sur le stress policier, sur le vécu quotidien des gardiens de la paix qui viellent de jour comme de nuit à notre sécurité. Leur tâche est parfois gratifiante, souvent ingrate – on songe au maintien de l’ordre – car ils sont une figure de proximité de l’autorité, très proche des citoyens, mais ils sont eux-mêmes soumis à une hiérarchie et à une culture de l'institution qui peuvent être en décalage avec leur vécu ; ces deux dimensions sont d’ailleurs liées : une police qui prend soin de ses policiers, de leurs émotions, est plus apte à se montrer humaine.

Pour aller plus loin

 

Par Antoine Garapon. Alors que la demande de justice n’a jamais été aussi forte et que le droit et les institutions n’ont jamais été aussi faibles, "Esprit de justice" propose de rechercher une boussole pour s’orienter dans ce monde troublé.

Tag(s) : #Police - Gendarmerie - Femmes
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