Document juin 2010 - Officier nazi, engagé volontaire dans
les SS, Kurt Gerstein était responsable de l'approvisionnement de l'acide prussique (Zyklon B) dans les camps d'extermination. Parallèlement à cette fonction qui faisait de lui
un complice des bourreaux, il chercha à avertir sans relâche les puissances occidentales, les pays neutres et le Saint-Siège des massacres perpétrés contre les Juifs dans les chambres à
gaz.
Qui fut donc Gerstein ? Quels mobiles guidèrent son action ? Que fit-il exactement pour saboter la machine d'extermination
nazie ? Quel fut le prix de son engagement ? Comment ce protestant si croyant, plusieurs fois arrêté par la Gestapo et opposant au national-socialisme, put-il devenir un acteur du génocide du
fait de ses fonctions, mais aussi un inlassable
Confrontant les correspondances de Gerstein, les témoignages et les extraits du rapport qu'il a lui-même rédigé, l'auteur brosse le portrait d'un homme ayant pénétré dans l'enfer avec l'intention
de témoigner devant le monde et d'aider les victimes. Il en révèle aussi les contradictions et les ambiguïtés. Plus qu'une biographie, ce texte examine non seulement l'attitude des bourreaux mais
aussi celle des « spectateurs » que Gerstein aura essayé d'alerter par tous les moyens face à la « solution finale de la question juive », sans jamais obtenir la réaction espérée.
Kurt Gerstein a inspiré Costa-Gavras pour son film, Amen.
Saul Friedländer est l'auteur de nombreux ouvrages, parmi lesquels Hitler et les États-Unis, 1934-1941 (Seuil, 1966), Pie XII et le III Reich (Seuil, 1964), Réflexions sur l'avenir d'Israël (1969), Reflets du nazisme (1982), Quand vient le «souvenir (1998). Il a codirigé, avec Elie Barnavi, Les Juifs et le XXe siècle - Dictionnaire critique (Calmann-Lévy, 2000). En 2007, il a reçu le prix de la Paix décerné par les libraires allemands. Les années d'extermination (1935-1945) a reçu en 2008 le prix Pulitzer dans la catégorie «Documents».
Léon Poliakov qui signe la postface de cet ouvrage fut un des premiers historiens a de la Shoah. Ancien directeur de recherche au CNRS, il assista Edgar Faure au procès de Nuremberg. Il a publié de nombreux ouvrages, dont Le mythe aryen, La causalité diabolique, Les totalitarismes du XXe siècle, Le bréviaire de la haine et Une histoire de l'antisémitisme.
-
Les courts extraits de livres : 16/06/2010
Extrait de l'introduction - Le 25 juillet 1945 dans l'après-midi, le lieutenant de S.S. Kurt
Gerstein est trouvé mort dans sa cellule à la prison militaire du Cherche-Midi à Paris. Trois mois auparavant, il s'était livré aux autorités françaises pour témoigner.
Le Dr Jacques Trouillet, qui constate la mort de Gerstein le même jour à 17 heures, a trouvé le corps étendu sur le lit de
camp de la cellule, enveloppé dans une couverture dont une partie avait été arrachée ; c'est avec celle-ci que le prisonnier se serait pendu. Pour le médecin légiste qui effectue l'autopsie, le
suicide semble certain :
L'autopsie montre, écrit le Dr Piedelièvre dans son rapport du 1er août 1945, qu'il s'agit d'un pendu banal, c'est-à-dire
ne présentant aucune trace de violence, mais un sillon de pendaison typique sans lésions profondes au cou.
On doit donc conclure à un suicide (aucune lésion suspecte (aucune trace de violence) (...)
Un rapport du commissaire de police de Notre-Dame des Champs, daté du 25 juillet 1945, contient la phrase suivante
:
« Gerstein a laissé plusieurs lettres dans lesquelles il fait connaître son intention de se donner la mort. Elles nous ont
été présentées. Elles doivent être remises au commandant Mattei». Ces lettres n'ont jamais été retrouvées.
Le 3 août, Gerstein est inhumé au cimetière de Thiais sous le nom de «Gastein». Pendant trois ans, sa famille reste dans l'incertitude quant à son sort. Ce n'est qu'en 1948 qu'elle est officiellement informée du suicide.
Le 26 octobre 1960, l'officier greffier-chef du dépôt central d'archives de la Justice militaire à Meaux adresse un rapport
au ministre des Armées. Après avoir résumé les circonstances présumées de la mort de Gerstein, l'officier greffier souligne :
(...) la procédure de clôture, par une décision de non-lieu (action publique éteinte) en date du 18 octobre 1945, n'est
jamais parvenue au dépôt central de Meaux.
À la place de celle-ci figure une mention portée en son temps par le greffe du Tribunal militaire de Paris : « dossier perdu ».
(...) néanmoins, il résulte de la dépêche N° 32827/ MG/DJM/2 CDC en date du 23 octobre 1945, retrouvée aux archives de l'administration centrale conservées par mes soins, que votre accord a été donné au commissaire du gouvernement près le Deuxième Tribunal militaire de Paris pour que cette procédure soit adressée au directeur du Service des recherches des crimes de guerre ennemis.
Auteur : Saul Friedländer
Postface : Léon Poliakov
Date de saisie : 09/06/2010
Genre : Biographies, mémoires, correspondances...
Éditeur : Nouveau Monde éditions, Paris, France
Liens utiles sur le site l'Histoire
La quête de Saul Friedländer par Annette Wieviorka
03/0008 | n°329 | Actualité | 4789 mots |payant
Avec le second tome de L'Allemagne nazie et les Juifs (Le Seuil), Saul Friedländer achève une oeuvre originale et puissante qui mêle, pour la première fois, récits des victimes et des bourreaux pour tenter de comprendre l'inexpliquable. Une interrogation qui n'a cessé de le hanter et qui est intimement liée à son propre itinéraire.
La gloire des justes par Annette Wieviorka
10/1998 | n°3 | Spectateurs, résistants et complices | 5362 mots |payant
Dans l'Europe occupée, une très petite minorité d'hommes et de femmes tentèrent, au prix de leur vie parfois, de sauver des Juifs de la mort. En les cachant, en leur procurant de l'argent et des faux papiers, en leur permettant de passer dans des pays neutres. Quelques organisations structurées virent le jour, mais la plupart de ces sauvetages furent le fait d'initiatives individuelles.
Au nom de tous les Justes par Annette Wieviorka
10/0007 | n°37 | Résister à la Shoah | 4501 mots |payant
Dans l'Europe occupée, une poignée d'hommes et de femmes tentèrent, au prix de leur vie parfois, de sauver des Juifs en les cachant, en leur procurant de faux papiers, en les faisant passer dans des pays neutres. La plupart de ces sauvetages furent le fait d'initiatives individuelles.