Les enfants prostitués

Document 2007 - Chaque année, plusieurs millions d'enfants sont abusés sexuellement et prostitués. Ils sont enlevés ou achetés à leurs parents, puis livrés à des proxénètes - notamment pour alimenter le tourisme pédocriminel. Violé, torturé, l'enfant, devenu marchandise, se vend bien et constitue un profit très lucratif.

Richard Poulin dénonce, chiffres à l'appui, le scandale mondial du commerce des enfants froidement planifié par des adultes sans scrupules. Il révèle que les États se font souvent complices de ces délits innommables favorisés par la mondialisation, et retrace les itinéraires internationaux de la traite - pays d'origine et pays de destination. Il montre que nos sociétés occidentales, clientes attitrées des pays pauvres, sont de plus en plus atteintes par ces pratiques mafieuses.

Pour Richard Poulin, l'exploitation sexuelle des enfants constitue aujourd'hui l'un des aspects les plus sordides de la prostitution - cet esclavage moderne si bien toléré - qui brise d'innombrables vies dans le monde, et ce dans l'indifférence générale.

Richard Poulin, professeur de sociologie à l'Université d'Ottawa, a publié de nombreux ouvrages sur la question du commerce sexuel, dont La Mondialisation des industries du sexe(Editions Imago, 2005).

• Les courts extraits de livres : 08/10/2007

Extrait de l'introduction : Les médias foisonnent d'informations sur les individus et les réseaux de prostitution et de pornographie violentant sexuelle­ment les enfants. Régulièrement, les lecteurs des journaux apprennent que des enfants sont agressés sexuellement dans le dessein, entre autres, d'exploiter commercialement ces abus, de rentabiliser cet assujettissement sexuel. Pourtant, il ne s'agit là que de la pointe de l'iceberg. Selon le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (Unicef), en 2001, dix millions d'enfants ont dis­paru, ont été abusés, prostitués, torturés ou assassinés dans le monde. Un enfant est violé toutes les trente secondes. Quelque cent millions d'enfants sont abandonnés dans la rue et doivent tenter d'y survivre. Entre un et deux millions d'enfants sont recrutés chaque année par les industries du sexe. En 2004, l'Unicef évalue à environ un million deux le nombre d'enfants victimes, chaque année, des trafiquants d'êtres humains. Le tou­risme sexuel est florissant : les destinations de prostitution sont bien connues et fort achalandées.

La traite des enfants est un commerce qui prospère dans de nombreux domaines. Durant les guerres civiles, des villages entiers sont détruits, les femmes violées, les adultes massacrés, les enfants enlevés et envoyés à la mort dans des unités d'en­fants soldats. Des enfants sont enlevés ou achetés à leurs parents sous de fausses promesses, vendus à des bordels, à des parents adoptifs étrangers ou loués à des propriétaires terriens, ou encore mis en esclavage domestique. En avril 2001, les journaux ont largement couvert l'affaire du bateau «Etireno» qui errait au large des côtes du golfe de Guinée en transportant des douzaines d'enfants au Gabon où ils allaient subir leur vente en tant qu'esclaves. Cet événement ne représente qu'une goutte d'eau face à la traite régionale des enfants africains. Plus de deux cent mille enfants sont tombés entre les mains de trafiquants dans la seule région de l'Afrique centrale et occidentale. Déjà, en 1992, un ferry transportant soixante-quatorze personnes destinées à être vendues, dont les deux tiers avaient moins de quinze ans, a été intercepté par la police du Bangladesh ; les femmes et les fillettes auraient été vendues moins de 350 euros chacune dans des bordels indiens et pakistanais. Ces dernières années, des milliers d'enfants d'Albanie ont été vendus à l'Ouest, surtout en Grèce et en Italie. Parmi eux, figuraient des nouveau-nés et des fillettes. Ces dernières ont été utilisées par les industries de la pornographie et de la prostitution, ainsi que par des organisations de mendiants qui n'hésitent pas à en mutiler certaines pour qu'elles fassent encore plus pitié (ce qui est également le cas des garçons). En juillet 2001, une bande internationale de trafiquants de jeunes filles qui, en Turquie, échangeaient des fillettes de Pologne contre deux kilos d'héroïne, a été démantelée en Italie. La liste des exemples pourrait être allongée indéfiniment. La marchandise enfant dans le monde du capitalisme néo-libéral se vend bien et rapporte gros. Les voies commerciales vont, tout comme les flux financiers et ceux des matières premières, du Sud et de l'Est vers le Nord et l'Ouest. Les enfants des minorités nationales et ethniques, avant tout les fillettes, sont particulièrement concernés. Cela est aussi vrai dans le tiers monde qu'en Europe orientale que dans les pays capitalistes dominants d'Occident.

Auteur : Richard Poulin

Date de saisie : 24/09/2007

Genre : Société Problèmes et services sociaux

Éditeur : Imago, Paris, France

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