Le seul magistrat Français, qui par conscience Républicaine refusa de prêter serment au Maréchal Pétain..
La promotion 1997/98 de L'Ecole Nationale de la Magistrature de Bordeaux a choisi de se nommer "Paul Didier" en hommage au magistrat.(Propos recueillis par C. Massaut et JF Couret).
Paul Didier est né à Carcassonne en 1889. Sa famille paternelle, originaire de lorraine, quitte sa région natale en 1871, pour rester française. Son père, Paul Didier, agrégé de chimie, Docteur en sciences, ancien élève de l'Ecole Normale supérieure, examinateur au concours d'entrée à l'Ecole spéciale militaire de Saint Cyr, doit quitter cette fonction en 1892 pour motif politique. Notons que son Grand père maternel, Ferdinand Théron, est député radical de l'Aude de 1885 à 1910.Paul Didier efectue ses études aux lycées Montaigne et Louis le Grand puis à la faculté de Droit de Paris. Docteur en Droit, licencié en lettres, diplômé d'études administratives et financières ainsi que de sciences pénales, il s'inscrit en 1911 au Barreau de Paris.
Mobilisé en 1914, il est combattant de la "Grande Guerre" au 112° d'Infanterie, guerre au cours de laquelle il est fait prisonnier à Mayence (en captivité, il rencontrera Mathurin Peyre de Moux, qui évoque ce moment dans ses Mémoires).
Il passe le concours de la magistrature en 1919, puis est affecté comme juge suppléant, à l'instruction, au Tribunal de Béziers.
A partir de 1922, il exerce ses fonctions à la Chancellerie où il devient Chef de Bureau Sous Directeur du Sceau en 1937, il réorganise le service des naturalisations afin de lui permettre de faire face à l'afflux des demandes (70 000 par an à partir de 1935).
Remplacé dans ses fonctions le 22 septembre 1940 (soit deux mois après la loi du 22 juillet 1940 ordonnant la révision de toutes les naturalisations intervenues depuis 1927). Paul Didier est nommé simple Juge au Tribunal de la Seine le 04 Octobre suivant, ce qui peut être assimilé à une disgrâce..
C'est le 2 septembre 1941 qu'au cours d'une audience solennelle du Tribunal de la Seine, Paul Didier, à l'appel de son nom, refuse courageusement de prêter serment de fidélité à la personne du Chef de l'état comme l'acte constitutionnel n°9 du 14 Août 1941 en faisait obligation aux magistrats. Le 4 septembre, il est suspendu par Joseph Bartelemy, Garde des Sceaux. Deux jours plus tard, il est arrêté, puis interné au camp de Chateaubriand, sur l'ordre du ministre de l'intérieur.
En Octobre, il échappe à l'exécution des 27 otages de Chateaubriand, fusillés en représailles de la mort d'un officier allemand. Assigné à résidence dans l'Aude à partir de fèvrier 1942. Paul Didier est officiellement mis à la retraite d'office le 11 août de la même année.
Ayant rendu des services à la Résistance locale, il est proclamé, le 20 Aout 1944, Vice-Président du comité de libération de Moux (Aude). Son action est signalée par Lucien Maury dans "Résistance Audoise".
A Paris, il est nommé le 30 septembre Directeur du personnel à la Chancellerie (ce qui correspond à l'époque à l'actuelle fonction de Directeur des Services Judiciaires) poste qu'il n'occupera pas en réalité, demeurant alors "introuvable" 'selon Me Normann alors conseiller du Ministre).
Déclinant une proposition de nomination en qualité de Premier Président de la Cour d'Appel il est finalement nommé le 21 octobre 1944, Président de la Chambre de la cour d'appel de Paris. A partir de novembre, il préside également une section de la cour de justice du département de la seine (chargée de juger les faits de collaboration). Refusant d'entrer à la cour de cassation en 1951, Paul Didier préférera, de 1950 à 1958 (date de son départ à la retraite) présider la chambre d'accusation de la cour de Paris. C'est à ce titre qu'il est confronté par la suite à plusieurs grandes affaires dont celle fameuse des "pigeons voyageurs". En pleine guerre froide, et alors qu'il circule en voiture aux abords d'une manifestation anti-OTAN qui avait été interdite, jacques Duclos, leader du PCF (1° parti de Frace à l'époque) est arrêté et placeé en détention préventive. Des pigeons "voyageurs" le rendant suspect d'espionnage ayant été découverts dans sa voiture. L'affaire a un retentissement considérable dans toute l'europe.
Sous la présidence de Paul Didier, la chambre d'accusation de Paris élargit Jacques Duclos le 1° Juillet 1952, relevant que la flagrance, seule circonstance susceptible d'écarter l'immunité parlementaire du député, n'était pas constituée. Le 16 Juillet suivant, un attentat à la bombre est dirigé contre le domicile du Président Didier, qui averti à l'audience, réagit avec beaucoup de flegme et de panache. "Messieurs, une bombe vient d'éclater à mon domicile. Excusez moi de vous avoir interrompus. L'audience est reprise".
Un article daté du 20 Octobre 1952 (journal?) de Madeleine Jacob dresse un portrait du Magistrat Audois.
Le journal "Le Populaire " du 4 Janvier 1945 précise que à la Cour de Justice est présidée par Paul Didier et qu'elle a comdamné pour cinq ans le commissaire Larieux, coupable d'avoir livré aux Allemands le commandant Chalandre.
Une brève biographie de Paul Didier est évoquée dans -Les Audois de Rémy Cazals et Daniel Fabre-
Ce grand magistrat français s'est éteint à Paris, en 1961, à l'age de 71 ans il repose à Moux au cimetière Municipal.
Hommage solennel fut rendu au magistrat en 1961 lors de l'audience solennelle de la Cour d'appel de Paris, par l'avocat général Lambert.
Son fils, le conseiller Paul Didier, choisit dés 1946 la voie de la magistrature, effectuant une part importante de sa carrière à Paris, au TGI puis à la cour d'appel, enfin à la Cour de Cassation (1982-1990), où il cumule ses fonctions avec celles de membre du Conseil Supérieur de la magistrature (1985-1987) et du Tribunal des conflits (1983-1989).
En 1978, lui fut décerné le prestigieux prix Henri Martin de l'Académie Française pour sa biographie de "Louis XVIII, roi de deux peuples".