Document mars 2010 - La représentation de la cruauté et du sang, qui passe pour moderne, n'a rien de nouveau. Nous avons toujours eu quelque bonheur à lire et à voir les horreurs du monde, ainsi que les souffrances de nos semblables... Grâce à ce livre qui fait enfin ressurgir une partie de notre histoire littéraire niée, oubliée, le lecteur pourra juger le crime, et peut-être aussi s'y perdre.
Qui n'a jamais pris du plaisir à lire un fait divers particulièrement cruel ? Qui ne s'est jamais arrêté devant un
tableau ou une photographie sanglante, ne serait-ce que pour, vertueusement, s'en indigner ? L'art contemporain, précisément, ne cesse d'y revenir, quitte à faire scandale : le dernier Festival
d'Avignon s'est illustré à montrer les combats, le sang versé et la violence...
Ce volume fait apparaître que la fin du XVIe et le début du XVIIe siècle ne cessent de représenter des scènes cruelles et
violentes dans les récits comme sur les scènes de théâtre.
La violence s'empare des toutes premières scènes théâtrales, des échafauds comme on les appelait alors, et où l'on va
jusqu'à jouer l'actualité la plus brûlante : la dernière journée et l'assassinat des rois sacrifiés, Henri III et Henri IV, au détail près. Et les récits ne sont pas en reste. Sous le prétexte
vertueux de dénoncer les horreurs de l'homme et ses vices, les auteurs d'" histoires sanglantes " se plaisent eux aussi à détailler les crimes : telle sorcière mise à la question et torturée
pour avoir connu le diable, tels orphelins dont on coupe les membres pour mieux les faire mendier, tel mari jaloux faisant manger à sa femme le coeur de son amoureux, ou telle comtesse enfermée
dans un cachot par son mari avec le corps écorché et empaillé de son supposé amant.
Le lecteur pourra découvrir ou redécouvrir des auteurs qui ont jusqu'ici échappé aux canons de l'histoire littéraire et
théâtrale.
La grande majorité de ces textes (une centaine de récits, une dizaine de tragédies) n'a jamais été publiée depuis les
années 1600. L'orthographe et la ponctuation ont été modernisées. Des notes en bas de page et un glossaire en fin de volume permettent une lecture plus juste et plus approfondie. Enfin, des
notices présentent les textes et les auteurs. Ainsi François de Belleforest, François de Rosset, Jean-Pierre Camus, auteurs des histoires tragiques et des histoires sanglantes, largement
rééditées durant tout le XVIIe siècle, en France et en Europe ; Alexandre Hardy (encore peu connu, mais le plus prolifique des auteurs du XVIIe siècle) ; les dramaturges normands (la Normandie
étant le grand lieu théâtral de l'époque : Nicolas Chrétien des Croix, Mainfray, et tous les anonymes) ; mais aussi ancêtre de nos faits divers, ce qu'on appelait des " occasionnels " et des "
canards sanglants ".
Professeur d'Histoire et esthétique du théâtre à l'Université de Paris Ouest–Nanterre et membre de l'Institut
Universitaire de France.Spécialiste de la littérature du XVI° siècle, de l'histoire des idées et des questions relatives au théâtre.
- La revue de presse Daniel Couty - Le Nouvel Observateur du 22 juin 2006
Que voilà, paradoxalement, un réjouissant volume. Un de ces volumes que Guy Schoeller puis Robert Kopp avaient le secret de nous mitonner, anthologies de sujets rares qui révélaient toujours nombre de belles pépites... Les titres, déjà, sont une promesse, qui accouplent «lamentable et pitoyable», «l'horrible et l'épouvantable», chantent «l'allégresse sur la mort»,... Les auteurs sont anonymes, méconnus ou oubliés... Ne serait-ce que pour voir l'autre face d'un monde que l'on nous présente toujours comme ordonné par le classicisme ou structuré par le baroque, il convient de lire ces pages qui font du désordre des corps et des moeurs l'ordre même de leur existence...
Theatre de la cruaute et récits sanglants en france (xvi-xvii siecle)
Auteur : Christian Biet
Date de saisie : 03/03/2010
Genre : Biographies, mémoires, correspondances...
Editeur : Robert Laffont, Paris, France
Collection : Bouquins