Dans les établissements classiques (autres que les bagnes), le costume pénal a une couleur uniforme plutôt « tristounet », davantage destiné à rendre ce costume le moins salissant possible. Quelques textes évoquent le droguet de laine ou de coton beige. En fait, le costume pénal varie du beige – marron au gris.
Au sein de l’établissement pénitentiaire, le costume pénal contribue explicitement à la notion de châtiment. Dès lors, on assiste à une stigmatisation des détenus. Le fait de les astreindre au port du costume pénal les identifie comme appartenant à un groupe déviant. DELMAS SAINT-HILAIRE parle d’une stigmatisation voulue qui va plus loin encore qu’une simple volonté d’exemplarité dissuasive. « Il y aurait alors deux degrés de stigmatisation : le premier se situerait au niveau du dépouillement de la personne détenue, le second résiderait dans la recherche de l’humiliation ».1
En fournissant aux détenus un costume réglementaire, l’Administration choisit elle-même la conception de ce costume et le façonne de telle sorte qu’il ne puisse être utilisé par la population pénale pour agresser les « gardiens » avant 1919 et les « surveillants » après cette date. La confiscation des vêtements personnels entraîne simultanément celle des accessoires susceptibles de servir à blesser, tels que boucles de ceinture, bretelles. Ces accessoires, potentiellement dangereux, sont remplacés par des accessoires en tissu ou des boutons prêtés par l’Administration pénitentiaire. On constate que rien n’est laissé au hasard, quand il s’agit pour l’institution de remplir « ses misions ». Même si l’on peut penser à posteriori que cette préoccupation apparaît tardivement dans les textes l’intérêt des détenus n’en est pas moins ignoré.
En principe, les prévenus et accusés ne sont astreints au port du costume pénal qu’autant que des motifs de sûreté ou de salubrité publique rendent nécessaires cette mesure, ou que l’état des locaux s’oppose à ce qu’ils soient séparés des autres détenus.
Concernant les détenus faisant l’objet d’une nouvelle poursuite, il est admis que ceux-ci peuvent revêtir leurs vêtements personnels à l’audience. Pourtant c’est seulement en 1939 que cette disposition est nettement affirmée.2
1 J.P. DELMAS SAINT-HILAIRE, « les vêtements du détenu », RCS, chronique pénitentiaire, avril-juin 1980, p. 471.
2 Note du Garde des Sceaux, ministre de la Justice à messieurs les directeurs des services extérieurs, 30 octobre 1939.
Philippe POISSON - 6 janvier 2006