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Nouveau portrait du jour Colette Dahais

Culture et justice développe la rubrique Portrait du jour, ouvre ses pages aux fidèles lecteurs  et reçoit avec infiniment de plaisir Colette Dahais

Colette Dahais signe avec Les petits pas des gazelles un beau récit au goût doux amer sur l’enfance et le quotidien en Algérie, sur fond de guerre d’indépendance.

Colette DAHAIS, après neuf années passées à Angers, s’installe à La Daguenière et concrétise ses aspirations d’écriture.

En 2019, elle ose enfin soumettre aux lecteurs ses mots et ses émotions. Elle aborde avec cette première publication un sujet encore douloureux dans les mémoires.

Le 18 décembre prochain verra la parution de son deuxième ouvrage : "De la contrainte à l'oubli", toujours chez le même éditeur. Cette fois, il s'agit de l'histoire d'un tout jeune mosellan, incorporé de force dans l'armée allemande lors de la Seconde Guerre mondiale. Ce Malgré-nous était son père.

Bienvenue Colette sur le très prisé et discret  Culture et justice

1.Bonjour Colette, vous éditez chez un éditeur indépendant régional Les Éditions du Petit Pavé. Avant de venir à votre prochain roman qui sera publié le 18 décembre voulez-vous nous parler de votre enfance et de votre parcours professionnel ?

Bonjour Phil et bonjour à tous vos lecteurs.

Avant de parler de moi, je vais me permettre un petit mot sur mes éditeurs, parce qu’ils le « méritent bien » – pour ne pas plagier une formule célèbre et à peu près identique -.

 

 

Les Éditions du Petit Pavé ont été fondées il y a vingt-cinq ans par Noëlle Joffard et Gérard Cherbonnier. Elles sont situées dans le Maine-et-Loire, presqu’en bordure de ce magnifique et dernier fleuve sauvage de France. Ce sont plus de quatre cents manuscrits qui leur sont adressés chaque année, uniquement vingt à trente d’entre eux sont publiés, à compte d’éditeur. Leur catalogue présente des romans, des biographies, de la littérature jeunesse, de la poésie mais aussi des nouvelles, des ouvrages de philosophie et des romans policiers. D’ailleurs, je vous invite à faire un tour sur leur site et sachez que les frais de port sont offerts.

Je peux maintenant avec grand plaisir répondre à vos questions. Attention je suis une grande bavarde. Allons-y !

Mon père étant marin d’état, affectation oblige, je suis née de l’autre côté de la Grande Bleue, en Algérie, du temps où elle était française. C’est un magnifique pays. Malgré une sale guerre, j’y ai vécu mes neufs premières années dans une délicieuse joie de vivre aussi devoir en partir à l’indépendance a brisé mon cœur d’enfant, thème de mon roman Les petits pas des gazelles.

Par la suite, j’ai vécu dans le sud-est de la France, en Alsace, en Allemagne, puis un temps aussi en République de Guinée et en Angleterre. En 1994, pour des raisons professionnelles et familiales, je suis arrivée en Anjou et j’y suis restée. De grande voyageuse, je suis devenue sédentaire.

En 1973 – ça commence à faire loin - j’ai débuté comme secrétaire dans une société de travaux publiques lors de la construction de la centrale nucléaire Fessenheim, en Alsace, puis je suis passée pour un temps par la Direction Départementale de l’Équipement de Colmar. En 1980, la Société américaine Mars, la même qui fabrique des chocolats pour les gourmands, m’a embauchée comme Chargée de voyages. Puis, de l’est je suis repartie au sud où j’ai travaillé pour la Fédération des Œuvres Laïques. C’est là que j’ai commencé à toucher de plus près le monde de l’édition et de la librairie. J’y donnais aussi des cours de français à des jeunes filles au pair de diverses provenances.

J’ai privilégié un moment ma vie de mère au foyer et par la même occasion je me suis mise à écrire des poèmes et des histoires pour enfants que j’ai gardés au fond d’un tiroir. En 2001, je suis devenue fonctionnaire d’état au ministère des Armées. Après huit années à la gestion des soldes, j’ai vécu une belle et stimulante aventure lorsqu’en mai 2009, j’ai changé de poste, direction le magnifique Musée du Génie d’Angers qui ouvrait ses portes au public le 14 juillet suivant. Durant presqu’onze ans, j’ai tenu le rôle de coordinatrice de ce musée. Cela a représenté beaucoup de travail, un profond investissement de ma part mais ce fut aussi une grande joie et une grande fierté. On ressort de ce musée étonné, enrichi, différent et surtout conquis, même si l’on ne possède pas la fibre militaire. Pour quelqu’un aimant l’Histoire, j’étais dans mon élément.

Mais il fallait bien arrêter un jour et en octobre 2019, j’ai pris ma retraite. Je n’avais qu’une hâte, consacrer une plus grande part de mon temps à l’écriture. Dès que j’ai su lire, je me suis prise de passion pour la langue française. Il faut dire que j’ai eu un bon exemple. Ma mère était une grande lectrice et m’a conduite vers cette littérature, que j’ai toujours considérée comme le parfait symbole d’évasion et de liberté.

2. Votre deuxième roman "De la contrainte à l'oubli" met en scène l'histoire d'un tout jeune mosellan, incorporé de force dans l'armée allemande lors de la Seconde Guerre mondiale. Ce Malgré-nous était votre père. J’imagine que la publication de ce roman vous tient particulièrement à cœur et n’a pas été forcément simple à écrire ?

Vous avez doublement raison. Voilà très longtemps que je souhaitais l’écrire et j’avais tous les éléments pour le faire. Pour m’aider, au fond de ma mémoire des discussions prolongées avec mon père et, en héritage, sur une cassette, sa voix et les détails révélés de ce momentané et si particulier chemin de vie. Mon envie d’écriture s’est faite encore plus pressante après son décès en 2008 mais trop prise par mon travail au musée, je repoussais sans cesse. N’était-ce qu’une excuse ? Je pense que oui, en partie du moins car à cette époque la gestion de mon temps n’était pas chose aisée. La véritable raison était que la simple idée d’entendre la voix de mon père disparu me faisait presque peur. Je redoutais les conséquences d’une émotion trop intense. C’est ainsi qu’à force de reporter au lendemain, il m’a fallu douze ans pour me mettre au travail.

Ce ne pas un sujet facile que celui des Malgré-nous. C’est comme cela que l’on appelle les Alsaciens, Mosellans et Luxembourgeois incorporés de force dans l’Armée allemande durant la Seconde Guerre mondiale. Il a toujours régné autour d’eux soit une grande ignorance de leur triste sort, soit une suspicion totalement illégitime, et c’est fort regrettable. La place faite à ces hommes dans la mémoire de notre pays est quasi inexistante. Sans compter que comme trop souvent à l’issue d’un conflit le mutisme des rescapés prend la place. Combien de ces hommes en taisant leurs possibles confidences n’ont pas transmis à leur descendance ce parcours guerrier qui leur a été imposé par l’ennemi. Alors, ayant eu le privilège d’avoir échappé à ce silence, comment garder cette histoire pour moi seule ?

Les points communs entre Les petits pas des gazelles et De la contrainte à l’oubli ce sont des destins individuels pris en étau et en otage par la Grande Histoire. Quant à la différence, c’est que cette fois il ne s’agit plus de mes propres émotions. Je désirais plus que tout que le lecteur se retrouve en tête-à-tête avec le narrateur au point d’en entendre sa voix. J’ai dû m’attacher à ne rien trahir de ce leg paternel tout en apportant une dimension plus littéraire à ses paroles. Pour ceux qui découvriront le sujet, j’espère que mon livre leur donnera l’envie d’approfondir leurs connaissances sur le tragique destin des Malgré-nous.

3. Colette, vous avez je crois d’autres projets littéraires en cours, je vous les laisse développer à nos lecteurs. En tout cas à Culture et justice nous savons votre appétence pour l’Histoire et la petite histoire ...

Exact Phil. Au-delà des dates, des événements, des batailles, ce qui me fascine c’est la petite histoire qui s’imbrique dans la Grande et le comportement de l’humain dans un contexte tragique. Il y a quelques mois, j’ai pu voir sur Arté un excellent documentaire sur les femmes reléguées en Guyane. Ce dernier a eu sur moi un impact certain et immédiatement mon imagination m’a entraînée vers un potentiel sujet de roman. Très peu de gens savent qu’au bagne il y avait des femmes. Entre autres ces récidivistes condamnées pour des petits délits. Même à l’issue de leur peine, impossible de revenir en Métropole. L’État ne voulait plus d’elles sur le territoire français. Cet été, je me suis rendue à Aix-en-Provence, aux Archives d’Outre-mer où sont conservés les dossiers de certaines de ces condamnées. Avec beaucoup d’amabilité, on a mis à ma disposition tous ces documents administratifs d’un autre temps, jaunis, fragiles, aux écritures appliquées, presque calligraphiées. Par trois fois, des missives personnelles – très rares - reflétant la misère humaine qui s’en dégageait m’ont fait monter les larmes aux yeux. J’ai toujours été attirée par le XIXème siècle et cela tombe bien, ce sera ma toile de fond pour ce futur roman que j’ai déjà commencé. En attendant de passer à la vitesse supérieure, je me suis fait une nouvelle amie : mon personnage principal.

Tout en répondant à vos questions, j’ai fait un constat : malgré les années qui passent, j’aime toujours autant défendre les causes où l’injustice prédomine.

Pour terminer Phil, je voudrais vous remercier de m’avoir accueillie si gentiment.

 

A propos du site : Musée - Histoire de la justice, des crimes et des peines | Criminocorpus propose le premier musée nativement numérique dédié à l’histoire de la justice, des crimes et des peines. Ce musée produit ou accueille des expositions thématiques et des visites de lieux de justice. Ses collections rassemblent une sélection de documents et d’objets constituant des sources particulièrement rares ou peu accessibles pour l’histoire de la justice."

 Relecture et mise en page Ph.P et S.P.

 

Tag(s) : #Coup de coeur du jour, #portrait du jour criminocorpus
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