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Portrait du jour - Fabrice Mauclair, Tourangeau et historien de la justice au XVIIIe siècle

Dessin baroque avec le glaive, provient du site d’images gratuites « Pixabay",

image modifiée par 

 

Nouveau portrait du jour Fabrice Mauclair

Culture et justice développe la rubrique Portrait du jour, ouvre ses pages aux fidèles lecteurs de la page et reçoit avec infiniment de plaisir Fabrice Mauclair

Bienvenue Fabrice Mauclair  sur le très discret et prisé Culture et justice Ph.P.

J'éprouve beaucoup d'émotion à publier le portrait du jour de Fabrice Mauclair étant moi-même natif de Richelieu. 

 

Interview réalisé par notre ami l'avocat et romancier Jean-Michel Sieklucki pour le compte de 

JMS : Bonjour Fabrice. Pour commencer, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Fabrice Mauclair. Tourangeau et historien ! En effet, je suis né à Tours (Indre-et-Loire) en 1969. Originaire de Saint-Christophe-sur-le-Nais, un village – auquel je suis resté très attaché – situé dans le nord du département, je vis depuis plus de 20 ans dans le sud-Touraine. Côté études, après une maîtrise d’histoire obtenue à l’université de Tours, j’ai décroché le CAPES d’histoire-géographie en 1993. Depuis, j’enseigne ces deux matières (avec l’Enseignement Moral et Civique) au collège, d’abord en région parisienne, à Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne), puis à Richelieu (Indre-et-Loire) depuis 1999. En 2006, je suis également devenu docteur en histoire moderne de l’université de Tours. La Touraine et l’Histoire font donc intimement partie de ma vie !

JMS : D’où vous vient cette passion de l’Histoire ?

Difficile question ! Mais si je cherche un peu, elle vient de loin : de livres d’histoire offerts par mes parents à l’adolescence, d’émissions « historiques » vues à la télé quand j’étais jeune, d’un instituteur de primaire qui avait dans sa classe ces fameuses affiches sur l’histoire de France… J’étais au premier rang et je les avais sous les yeux en permanence : Jeanne d’Arc, la prise de la Bastille, Du Guesclin entrant dans une ville déguisé en marchand de bois… Enfin, des professeurs d’histoire croisés au collège, au lycée puis à l’université, qui, étrangement, m’ont davantage marqué que les professeurs d’autres matières.

JMS : Et pourquoi ce goût particulier pour le XVIIIe siècle ?

Ce goût est tardif. Il est apparu à l’université et m’a été transmis en grande partie par deux « maîtres », Claude Petitfrère et Brigitte Maillard, qui enseignaient cette période lorsque j’étais étudiant à Tours. Le premier était spécialiste des villes et la seconde des campagnes. Pour mon mémoire de maîtrise, je voulais travailler sur mon village natal. C’est donc presque naturellement que j’ai choisi le XVIIIe siècle et Mme Maillard. Deux ans plus tard, après avoir obtenu le CAPES, j’ai commencé une thèse. Et je suis resté fidèle au siècle des Lumières et à Mme Maillard ! Depuis, je ne sors quasiment plus de ce siècle ; j’ai appris à le connaître et à l’apprécier. Pourtant, je ne suis pas un défenseur inconditionnel ou un admirateur béat du XVIIIe. Ce siècle a beaucoup de défauts. Ainsi, pour la très grande majorité de ceux qui l’ont vécu, les conditions de vie étaient extrêmement dures. Mais ce siècle a aussi connu de profondes évolutions, notamment intellectuelles et culturelles, qui ont fait la France et le monde d’aujourd’hui. C’est ce qui le rend passionnant.

JMS : La Touraine du XVIIIe siècle est-elle singulière dans la France de l’époque ou conforme aux autres régions quant aux questions judiciaires notamment ?

La Touraine n’a rien de singulier au XVIIIe siècle, elle est, pourrait-on dire, « dans la norme ». D’ailleurs, lorsque Tocqueville a rédigé L’Ancien Régime et la Révolution (1856), il a essentiellement travaillé à partir d’archives tourangelles ! Ainsi, en matière judiciaire, la Touraine ressemble à bon nombre d’autres provinces en France. Cependant, lorsque l’on travaille sur la période qui a précédé la Révolution, il faut toujours être très prudent et éviter les généralisations. N’oublions pas en effet, comme le disait Mirabeau en 1789, que la France était alors un « agrégat inconstitué de peules désunis ». De fait, sous l’Ancien Régime, les exceptions et les « particularismes » sont nombreux, notamment dans les provinces périphériques ou celles entrées tardivement dans le giron des rois de France.

JMS : Comment un enseignant d’Histoire trouve-t-il, en plus de son métier, le temps d’écrire des livres ?

En consacrant beaucoup de son temps libre aux lectures, à la recherche dans les archives et à l’écriture ! Ainsi, les soirées, les mercredis, les week-ends et les vacances scolaires sont souvent consacrés à ces activités. Mais je fais tout cela avec passion et avec un bonheur infini. Je pense d’ailleurs que des temps de « respiration » et d’« évasion » sont indispensables lorsque l’on enseigne dans le Secondaire. Le métier d’enseignant n’est pas simple et nécessite d’avoir des à-côtés. En somme, je mène un peu deux vies à la fois. Celle d’un enseignant en histoire et celle d’un historien. Et je m’en porte très bien !

JMS : Dites-moi comment se prépare un livre historique tels ceux que vous écrivez ? Où va-t-on chercher sa matière ? Cherche-t-on plusieurs sources ?

La matière principale, c’est l’archive. Je passe donc énormément de temps dans les lieux où l’on peut la trouver, autrement dit dans les dépôts d’archives. Pour ma thèse, j’ai eu l’occasion de travailler aux Archives nationales et à la Bibliothèque nationale de France. J’ai également été amené à consulter des documents « bruts » à Angers, Le Mans, Versailles… Mais mon « terrain de chasse » privilégié reste les Archives départementales d’Indre-et-Loire, rue des Ursulines à Tours. Je fréquente ce lieu depuis près de trente ans ! C’est un peu, après le collège et mon domicile, ma troisième maison. Bien évidemment, le travail aux archives ne suffit pas. Il faut aussi beaucoup lire. Se tenir au courant des dernières publications : articles, livres, thèses… La recherche évolue sans cesse et il est capital, pour un historien, de se nourrir des lectures et des réflexions (toujours stimulantes) des autres. L’Histoire n’est jamais écrite une fois pour toute.

JMS : Quels livres avez-vous écrit ?

Essentiellement des monographies en rapport avec l’histoire de la justice en Touraine à la fin de l’Ancien Régime. En premier lieu, tirés de ma thèse, deux ouvrages : La justice au village. Justice seigneuriale et société rurale dans le duché-pairie de La Vallière (1667-1790), Presses Universitaires de Rennes (2008) et Crimes au village. Histoire(s) de la criminalité ordinaire dans la Gâtine tourangelle au XVIIIe siècle, Geste éditions (2011). Puis des études plus générales sur l’ensemble de la Touraine : Tranches de vie en Touraine au XVIIIe siècle. À travers les archives des justices seigneuriales, Anovi (2015) ; La justice des Lumières. Les tribunaux ordinaires en Touraine au XVIIIe siècle, Presses Universitaires François Rabelais (2019) et Crimes et justice en Touraine au XVIIIe siècle, Lamarque (2020). Il m’arrive aussi de sortir de ma période et de mon domaine de prédilection. Pour l’éditeur La Geste, j’ai ainsi rédigé deux petits ouvrages sur la ville de Richelieu (2011) et sur les châteaux de la Loire (2017). Enfin, je m’associe parfois à d’autres auteurs. Ainsi, j’ai participé au livre sur la colonie agricole et pénitentiaire de Mettray écrit par un certain Jean-Michel Sieklucki !

JMS : Des projets pour l’avenir ?

Oui, les idées ne manquent pas ! En 2021, si tout va bien, avec vous, un livre sur des « Faits de justice en Touraine, du Moyen Âge à nos jours », et un autre, toujours avec vous, sur la peine de mort en France. L’année 2021 marquera en effet les 40 ans de l’abolition de la peine capitale dans notre pays. J’ai également un manuscrit, totalement achevé, sur les mots et expressions de la justice (d’hier et d’aujourd’hui), qui n’attend plus qu’un éditeur. J’ai déjà le titre : « L’affaire est dans le sac » !

JMS : En dehors des livres, je me suis laissé dire que vous aviez le temps aussi de faire des conférences ou des communications dans divers endroits. Vous pouvez nous en dire quelques mots ?

Publier des livres n’est pas suffisant pour diffuser et faire connaître ses recherches. Il faut aussi utiliser d’autres moyens. Voilà pourquoi je participe parfois à des colloques universitaires. Je donne également régulièrement des conférences dans les deux principales sociétés savantes d’Indre-et-Loire : la Société Archéologique de Touraine et l’Académie des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Touraine. Je suis d’ailleurs membre de ces deux sociétés. J’interviens aussi très souvent dans des associations d’histoire locale, comme à Saint-Christophe-sur-le-Nais (le village de mes parents), Château-la-Vallière, Château-du-Loir (Sarthe)… et dans des bibliothèques municipales. Grâce à Eric Labayle, un ami historien et éditeur, j’ai également pu prendre la parole dans le cadre du « Café histoire » organisé à Chinon. À chaque fois, les échanges avec le public ou les collègues sont très fructueux. J’apprends beaucoup lors de ces moments. Il en est de même dans les différents salons du livre auxquels je participe.

JMS : Et les autres passions de l’homme ? Car je suppose qu’il y en a.

Oui, heureusement pour moi, il n’y a pas que l’Histoire dans ma vie ! Mes deux autres passions sont le vélo et la musique. La première m’a amené à faire de la compétition durant plusieurs années, notamment lorsque j’étais en poste dans la région parisienne. Depuis l’arrêt des courses, je pratique le vélo dans un club de cyclotourisme et avec des amis. À ce propos, entre 2008 et 2017, pendant l’été, avec deux amis et collègues du collège de Richelieu, j’ai réalisé un « tour des Saint-Christophe de France » à vélo : 40 Saint-Christophe visités, 40 départements parcourus, 40 étapes, 4000 km ! Je joue aussi de la batterie. Je pratique notamment cet instrument dans un groupe composé essentiellement d’enseignants. Comme quoi, du vélo à la batterie, l’Histoire mène à tout !

Tag(s) : #portrait du jour criminocorpus, #Coup de coeur du jour
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